SAMURAÏ DIPLOMATES ET AMBASSADEURS

Privilège du samuraï

Daisho : Katana et Wakizashi, le privilège du Samuraï. XVIIe siècle, époque Genroku. Collection Le Dauphin. Exposition « Les Samuraï, armes et armures du XVIe au XIXe siècle » au « Printemps Haussmann-Sept-Oct 1982.


                                   SAMURAI DIPLOMATES ET AMBASSADEURS

L’isolement du Japon de l’ère Tokugawa d’Edo, de 1600 à 1853, correspondait à la mise à l’écart du Tenno (Empereur) au profit du Shogun (Maire du Palais et véritable détenteur du pouvoir politique), au morcellement de l’Empire en différentes principautés dont certaines se complaisaient dans une violente rivalité, et au figement d’une société dans laquelle la puissante et prolifique classe des Samuraï prospérait.

Est-ce à dire que les Samuraï furent des traditionalistes invétérés ?

Que non !…

LES PREMICES

L’Histoire du Japon démontre au contraire qu’à partir du XVIème siècle ils avaient été, forcément ne serait-ce que du fait de leur omnipotence, mais surtout de leur culture, les promoteurs, acteurs, organisateurs et administrateurs de l’ouverture sur l’extérieur du Japon, certes quasiment forcée à partir de 1853, si l’on considère uniquement la relation du Japon avec l’Occident.

Car, pour ce qui concerne la relation du Japon avec ses voisins du pourtour asiatique, soit en direction de la Chine, soit en celle des îles de l’Asie du sud-est, l’Empire du Soleil Levant avait une politique d’expansion dominante aidée par une grande maîtrise des mers.

Pour ce qui concerne la relation du Japon avec l’Occident donc, les prémices en furent, dès à partir du XVIème siècle la venue de missionnaires portugais, puis espagnols et de grands marchands hollandais dans le sud du « puissant royaume du Japon », selon l’expression de l’un des principaux agents de la Compagnie néerlandaise des Indes Orientales, le nommé François Caron.

Au milieu des années 1600 Caron eut à ouvrir d’importants comptoirs au Japon, notamment à Deshima et à Nagasaki au sud-ouest (Ile Kyushu) , et y avait vécu vingt ans durant non sans y prendre femme et lui faire six enfants.

Une double parenthèse intéressante doit ici s’ouvrir, car du fait de son riche séjour japonais et de sa position d’homme d’affaires influent Caron eut, d’une part, à devenir un fin diplomate au service du Shogun et de Daimyo régionaux pour développer le commerce avec l’Occident, et en cela il s’intégra dans un nouveau cercle de Samuraï ouverts aux influences étrangères, et pas seulement occidentales ; et d’autre part, Caron eut par la suite à proposer à la France, à travers la toute nouvelle Compagnie française des Indes Orientales, ses services.

S’agissant de la première de ces circonstances, étant reconnu dans cette qualité de diplomate par les autorités japonaises, Caron fut ipso facto admis dans la classe des Samuraï. Ce qui lui permit de s’ouvrir les arcanes complexes du pouvoir au Japon, d’y exercer ses talents de négociateur et d’observateur privilégié de la société comme des us et coutumes japonais.

Quant à la seconde, Caron n’eut aucun mal à convaincre Colbert, alors le puissant contrôleur des finances du vieillissant roi Louis XIII dit « le Juste », de créer à Taolagnaro sur la côte sud-est de Madagascar (où, selon Caron, des naufragés portugais avaient occupé le site entre 1504 et 1528 – voir : « Le puissant royaume du Japon » de François Caron, éditions Chandeigne, 2003) un important établissement français intégré dans un vaste projet de route maritime afro-asiatique englobant Madagascar et le Japon au bénéfice de la nouvelle Compagnie française des Indes Orientales.

Cet établissement français à Madagascar fut fondé en 1642-43 sous le nom prémonitoire de Fort-Dauphin, du nom du futur Louis XIV.

clan nakagawa

Le Daimyo (seigneur) Nakagawa Hisayori et sa cour. Détail de « la chasse au cerf sur le mont Miyake », rouleau peint. Tiré de l’ouvrage « Le puissant royaume du Japon », de François Caron. Editions Chandeigne, Paris 2003.


Ainsi furent envisagés par un Français quasi Japonais, Caron, et la France de Louis XIII et Louis XIV avec le puissant Colbert, et à travers le commerce international, les destins mêlés de Madagascar et du Japon dès le XVIIème siècle… !

LA NOUVELLE VISION RELATIONNELLE JAPONAISE FACE A L’OCCIDENT

Mais, revenons au plus près du cœur de notre sujet : Samuraï diplomates et ambassadeurs…

Ainsi que nous le laissions entrevoir dans les lignes précédentes, ce n’est bien sûr pas du jour au lendemain que ni le Japon ni la classe des Samuraï se sont ouverts à la diplomatie.

Mais, il faut bien le reconnaître, c’est une circonstance déterminée de cette arrogance coloniale occidentale du milieu du XIXème siècle qui, sous le terme pudique de l’ « Ouverture », força le Japon à accepter d’ouvrir au commerce occidental ses ports.

Voici qu’en 1853, venant de l’Amérique en proie à « la question noire » qui, en dépit du « compromis du Missouri », voit se profiler une nette coupure des « Etats-Unis » en deux parties opposées, le sud esclavagiste défendeur d’un libre échange intégral et le nord démocrate soucieux des droits de l’Homme, le commodore américain Perry croise au large du Japon face à Yokohama et à hauteur de Tokyo (Edo).

L’année suivante en 1854 il exige du gouvernement japonais et obtient de lui l’ouverture des ports ainsi que, en 1858 après de longues tractations, la signature du traité de Kanagawa (d’une localité proche du port de Yokohama).

Les négociateurs japonais, Samuraï de condition, ne purent rien contre la force de frappe et les canonnières occidentales menées par Perry. Par la suite en 1859, trois concessions occidentales sont ouvertes (douanes et tribunaux contrôlés par les puissances occidentales : Etats-Unis, France, Angleterre, Pays-Bas, auxquels s’ajouta la Russie) dans trois zones stratégiques de l’Empire du Soleil Levant : les villes portuaires de Hakodate au nord du Japon (sud de l’Ile de Hokkaido), de Yokohama au centre-est du Japon (face à Edo – Tokyo) et de Nagasaki au sud-ouest du Japon (Ile Kyushu).

Le tout est « régularisé » par des traités de commerce avec les puissances occidentales, ce qui provoque de violentes réactions de Samuraï provenant essentiellement des régions du sud-ouest du Japon, notamment des fiefs de Choshu et de Tosa.

C’est dans ces conditions qu’étant placés entre le glaive et l’enclume le Tenno et le Shogun s’accordent pour envoyer en Occident des ambassades itinérantes successives. Progressivement, à la faveur de cette « ouverture » du Japon et dans une sorte de politique de salut public voit se profiler nettement la « restauration » des pouvoirs du Tenno au détriment de ceux du Shogun, mais pour l’instant sans impliquer son élimination.

C’est que le message qu’il convient de destiner aux pays occidentaux est celui-ci : en dépit des traités inégaux signés sous la menace, le Japon contrairement à une Chine dépecée demeure un pays non soumis et volontairement entend se comporter vis-à-vis des pays occidentaux en égal, en une puissance qui compte et en partenaire digne de considération.

Il s’agit là pour d’importants Samuraï d’exercer à titre principal le métier de diplomate, nouvelle fonction moderne détachée de leur condition première de guerriers … !

Mais en réalité, est-ce vraiment « nouveau » pour eux, adeptes des multiples facettes du Bushido (voir sur ce même blog la série de trois articles « Bushido », datés du 11, 12 et 13 janvier 2014), et d’une certaine façon des enseignements de Sun Ze, le fameux stratège et tacticien chinois qui prône dans l’esprit de tout guerrier ou lettré la dominance souhaitable du diplomate sur le militaire (voir sur ce même blog l’article « Sun Ze, la modernité du tacticien et du stratège chinois » daté du 27 décembre 2014) ?

Officiellement, et pour faire valoir une vision nouvelle des rapports extérieurs du Japon fondée sur une diplomatie « tous azimuts » que nous qualifierions aujourd’hui métaphoriquement de « soft-ware », c’est-à-dire basée sur un désir et une volonté de connaissance et d’ « in-put » culturels, Tenno et Shogunat japonais s’accordaient pour considérer que pour assurer sa pérennité le Japon se devait d’apprendre davantage sur les leviers de la puissance des pays occidentaux.

LES AMBASSADES ITINERANTES JAPONAISES SUCCESSIVES

Il est significatif qu’à l’achèvement de la pacification du Japon en 1615, marquant la fin d’incessantes guerres intestines entre grands Daimyo, mais au milieu d’une vision pour laquelle les étrangers, essentiellement concentrés dans le sud du Japon, demeurent des « barbares du sud » (« nambanjin »), le Daimyo de Sendai (au nord-est du Japon), Masamume Date, ait pris l’initiative hardie d’envoyer auprès du Pape à Rome ainsi qu’en Espagne et au Portugal un ambassadeur du nom de Rokuemon Tsunenaga Hasekura.

Il est vrai qu’alors le Japon comptait pas moins de 150.000 chrétiens et accueillait une soixantaine de missionnaires catholiques (lesquels enseignaient aussi les sciences et les arts) en provenance essentiellement du Portugal, et que les Espagnols entretenaient des relations commerciales moins agressives que celles imposées par les Hollandais ou autres Anglais.

Mais le niveau de représentation de cette ambassade japonaise en Europe de ce début du XVIIème siècle renaissant pour le Japon n’atteignait pas encore celui des autres ambassades successives qui vont suivre au XIXème siècle.

Car, le corps des nouveaux ambassadeurs et diplomates japonais correspondant à la période de modernisation du Japon avec un pouvoir central fort fut constitué à partir d’une élite de Samuraï aguerris et lettrés, proches à la fois du Tenno et du Shogun afin qu’ils leur soient pleinement représentatifs dans le prestige de leurs fonctions, mais aussi dans ce que la civilisation de l’Empire du Soleil Levant a de plus authentiquement brillant.

En tout cas, voici qu’en 1860 une première ambassade composée entièrement de Samuraï part pour les Etats-Unis. Là-bas, le conflit qui divise les Etats du sud de ceux du nord bat son plein sur fond de la profonde problématique de l’esclavage, contre lequel pour l’heur le 16ème Président des Etast-Unis, Abraham Lincoln, n’y peut rien.

L’ambassade japonaise, conduite par le Samuraï Ikeda et composée de trois autres diplomates de haut rang, fut reçue aux Etats-Unis avec des péripéties uniques et inédites qu’un film hollywoodien des années 1970, avec le fameux acteur japonais Toshiro Mifune, avait bien relaté.

C’est que les Américains étaient très curieux d’en connaître davantage sur ces « barbares » de Japonais « bizarrement » accoutrés ; et de leurs côtés, les diplomates japonais mirent un point d’honneur à, en effet, s’habiller de leurs costumes traditionnels agrémentés, bien sûr, de leurs sabres longs (« Katana ») et courts (« Wakisashi »).

Et, tout naturellement à Washington, au Président des Etats-Unis lui fut offert un de ces merveilleux « Tachi » (sabre très long) de collection, témoignage protecteur d’une amitié que le Tenno et le Shogun voulaient affirmer avec une solennité particulière.

L’Ambassadeur Ikeda, de par tant de sa personnalité que de par sa dignité naturelle, l’offrit au président américain avec une grande délicatesse et selon un cérémonial bien réglé.

Tachi

Tachi, grand sabre cérémonial type Itomaki, période Momoyama, collection Le Dauphin. Tiré du catalogue de l’Exposition « Les Samuraï, armes et armures du XVIe au XIXe siècle, ci-dessus référencée.


Ensuite, en 1862 une seconde ambassade itinérante japonaise, importante en nombre celle-là, fut formée avec pour destination l’Europe, principalement la France et l’Angleterre.

Elle est conduite par le Samuraï-Ambassadeur Takenuchi Yasunori et est composée de pas moins de vingt et un autres membres.

A Paris les membres de l’ambassade sont logés à l’Hôtel du Louvre. La personnalité du chef de la mission diplomatique est, contrairement à celle, avenante, de son collègue Ikeda, quelque peu renfrognée. Si bien que peu d’échanges personnels furent signalés pour la postérité…Mais, parmi ses adjoints se signale un nommé Fukuzawa Yukichi qui nota dans ses rapports bien de faits sociaux et traits de la gouvernance de Napoléon III.

En bon diplomate soucieux de nouer des liens profonds avec les Français influents de son époque, il n’hésita pas à pénétrer les milieux culturels et universitaires parisiens, ce qui le mit en rapport avec un certain Léon de Rosny qui, par la suite, fut le premier professeur de japonais de la nouvelle Ecole des Langues orientales l’ancêtre de l’actuel Institut National des Langues Orientales (INALCO, dont nous sommes fier d’être un ancien élève diplômé…).

Pareillement que leurs prédécesseurs membres de l’ambassade itinérante aux Etats-Unis, les ambassadeurs et diplomates japonais missionnés en France et en Angleterre se déplacent vêtus de leur tenue traditionnelle, sabres longs et courts fixés à la hanche gauche.

Ni en France ni en Angleterre, où ils sont maintenant, la presse ne se montre tendre avec ces Japonais regardés avec une méfiante curiosité…Il est vrai que par nature ces Samuraï ne sont guère éduqués ni instruits ni non plus cultivés pour l’extraversion, et ceci est renforcé par les nécessités de leurs fonctions qui veulent qu’un diplomate doit avant tout cultiver la discrétion…

Les journaux restent donc sur leur faim, et par atavisme professionnel se rabattent sur des points de vue mitigés concernant ces ambassades.

Ambassadeur-Samuraï Ikeda Nagaoki

Le jeune et bel Ambassadeur-Samuraï Ikeda Nagaoki Chikugo no Kami. Photo tirée de l’ouvrage « Les derniers samourais ». Editions Marval.


Et voici qu’en 1864, arrive une seconde ambassade itinérante japonaise pour l’Europe, conduite par un jeune et bel Ambassadeur-Samuraï, Ikeda Nagaoki Chikugo no Kami.

Le Bakufu (le gouvernement du Shogun) leur demande de passer par l’Egypte, berceau de l’Ancienne civilisation, avant d’entrer en Europe par Marseille. L’ambassade japonaise est aussi nombreuse que la précédente, une vingtaine de membres.

Bien sûr, dans leurs nombreux rapports les diplomates japonais témoignent de l’extraordinaire richesse de cette civilisation disparue et renforcent au Japon même une école de l’antique Egypte qui aujourd’hui figure parmi les plus éminentes au monde.

Cette escale touristique n’est pas de trop pour donner du ressort moral aux membres de l’ambassade japonaise.

Car, il lui est confié pour l’Europe une mission cruciale : faire accepter par les Européens une révision des traités inégaux, ce d’autant plus que les daimyo (seigneurs régionaux) de Choshu venait de s’opposer par la force au franchissement par les navires occidentaux du détroit stratégique de Shimonoseki (séparant l’Ile principale du Honshu et l’Ile de Kyushu), et que, au surplus, le Tenno avait exigé l’expulsion des étrangers dont le comportement outrancier mécontentait de plus en plus de Japonais.

Cependant, la coalition des puissances occidentales, fidèle à sa politique de la canonnière, ne s’embarrassa d’aucune réserve et brisa la résistance japonaise à Shimonoseki en 1864.

Et de leur côté les Anglais n’hésitèrent pas à incendier la ville de Kagoshima. Pour sa part, la France exige des indemnités pour le tort provoqué par l’assassinat du lieutenant Camus perpétré par des Samuraï.

Comment dès lors parvenir à convaincre des puissances occidentales bercées par leur arrogance ?

L’Ambassadeur-Samuraï Ikeda Nagaoki Chikugo no Kami se concentre sur l’exigence impériale de la fermeture du port de Yokohama. Tandis que de son côté le Shogun lui demande d’obtenir de la France le renoncement aux « indemnités Camus ».

C’en fut trop.

En dépit de tous ses efforts l’Ambassadeur-Samuraï n’obtint rien.

                                                                             *

                                                                          *    *

Du point de vue du Japon, il convient de relativiser l’échec successif des ambassades japonaises en Occident, car en définitive il a catalysé la capacité de l’Empire du Soleil Levant à s’extraire de l’emprise occidentale, d’abord par la mise à bas du trop pesant pouvoir shogunal, puis en s’en étant débarrassé, par la reconcentration du pouvoir exécutif entre les seules mains du Tenno, ouvrant ainsi la voie à l’ère Meiji, tout ceci se déroulant rapidement entre 1867 et 1868.

Avec l’abolition parallèle des fiefs en 1871, c’est-à-dire des principautés, le Japon entre de plain-pied dans la modernité institutionnelle, mais le prix à payer pour les Samuraï était en 1876 la suppression de leurs privilèges et l’abandon de leurs symboles, principalement le port des deux sabres long et court.

Et on sait que par un quasi suicide collectif des Samuraï les plus traditionalistes dans une légendaire dernière bataille du sabre contre les armes à feu de la nouvelle armée impériale en 1877, la classe des Samuraï enterra définitivement ses privilèges.

Mais, ce ne fut pas pour autant la mort des Samuraï en tant qu’individus fiers de leur condition.

Car, beaucoup d’entre eux, et jusqu’à nos jours, surent se reclasser dans différents métiers pour construire le Japon moderne.

Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo, ancien Ambassadeur, Avocat honoraire au Barreau de Paris, Professeur d’Aïkido 5ème dan

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ANDRIAMIHAJA: UN DESTIN BRISE PAR UNE FOLLE AMBITION

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« Cadre sans image » – JPRA –


 

                      ANDRIAMIHAJA, UN DESTIN BRISE PAR UNE FOLLE AMBITION

La fougue était sa marque.

Parce que l’épopée du grand-roi Radama 1er le galvanisait. C’est ainsi que sous le roi Radama 1er, qu’il admirait par-dessus tout, Andriamihaja réussit-il à gravir tous les échelons militaires pour rapidement devenir un très jeune officier supérieur au grade de 7 voninahitra (commandant).

Le Roi, qui savait détecter ici et là des éléments brillants et plein d’avenir dans la jeune génération montante issue de la classe roturière et de la noblesse, ne se contenta pas de lui attribuer un tel grade, il en fit l’un de ses conseillers, au sein d’un cercle composé quasi-exclusivement de nobles, ce que n’était pas Andriamihaja. Elément brillant, dynamique, jeune mais déjà plein d’aplomb, il s’est cependant soudainement laissé mener par une folle ambition, celle qui conduit à un appétit vorace du pouvoir.

Il est vrai, l’ambiance de fin de règne de Radama 1er, cloué au lit par la maladie et mis à l’écart, pour ne pas dire cloîtré, les circonstances du moment et les visées de ses frères de clan y poussaient Andriamihaja (voir sur ce même blog l’article « Réformateurs et modernisateurs de Madagascar, 4ème partie », daté du 10 octobre 2013).

L’ENTREE EX ABRUPTO DANS LE VIF D’UN FOL COMPLOT

Voici donc Andriamihaja qui se mue en un véritable activiste, capable de violence et de la plus grande duplicité, ce qui bientôt le perdra.

C’est l’époque où Ramavo (future Ranavalona 1ère) aurait tout particulièrement promis de grands privilèges à Andriamihaja s’il pouvait contribuer décisivement à la mettre sur le trône, avec l’aide d’autres personnalités proches de Radama 1er.

Pour que la thèse d’un complot contre Radama 1er ne se découvre pas, il fallait en effet que ceux qui devaient pousser et porter Ramavo sur le trône soient des personnages ayant fait partie du proche entourage politique du grand-roi.

On sait que Radama 1er avait senti, un an avant sa mort prématurée, un vent grandissant de fronde parmi le peuple, lequel était facilement travaillé par les dignitaires les plus conservateurs qui, de façon de plus en plus ouverte, reprochait au roi Radama 1er de manifester trop de mépris pour les us et coutumes traditionnels et de trop s’adonner à l’alcool.

Les reproches se muèrent rapidement en actes d’accusation précis, et pour le parti des traditionalistes il s’agissait donc de manœuvrer avec suffisamment d’adresse. C’est pourquoi, ils poussèrent en avant certains des éléments les plus ambitieux de l’entourage de Radama 1er, eux-mêmes se tenant en embuscade. Ceux-là étaient les véritables chefs du complot anti-Radama : Rainiharo et Rainijohary.

De cette façon, Andriamihaja était devenu, avec Rainimahay, déjà d’un âge certain, l’un des personnages-clés de l’avènement de Ranavalona 1ère et, pour bien ancrer leur attelage, tous deux étaient devenus, tour à tour, les premiers amants attitrés de la nouvelle reine avec tous les encouragements voulus.

Mais, sur le plan purement politique, ce fut d’abord Andrianamba, un vieux noble, qui fut Premier ministre et Rainimahay Second ministre avant que ce dernier n’accède au premier rôle ; mais assez rapidement, fin 1828/début 1829, c’est Andriamihaja, fort de sa position de jeune amant de la reine, qui prit l’ascendant et fut désigné Premier ministre, sachant qu’en réalité ce titre n’existant pas encore à cette époque là, il s’agissait plutôt du « premier des ministres », équivalant à « ministre favori » de la reine, ce qui correspondait bien à cette proximité physique dont jouissait Andriamihaja auprès de sa reine.

Du coup, Rainimahay redevenait Second ministre…

La position de Andriamihaja auprès de la reine Ranavalona 1ère doit être d’autant plus soulignée qu’elle était privilégiée à plus d’un titre. Entre le reine et lui, il y avait en effet une authentique histoire d’amour.

Il est d’ailleurs admis sans contestation sérieuse que Andriamihaja est le père biologique de Rakoto, seul fils qu’ait eu Ranavalona 1ère.

Or, Rakoto, né le 23 septembre 1829, soit plus de treize mois après le décès de Radama 1er, qui intervint le 2 août 1828, ne pouvait évidemment pas être le fils du grand-roi comme on tenta alors de le faire croire, et Rakoto sera plus tard le successeur de la reine Ranavalona 1ère, prenant pour nom Radama II.

LA FRAPPE IMPITOYABLE

La position de « Favori de la Reine » était ce qu’il y avait de plus précaire et de plus dangereux et Andriamihaja dans sa fougue ambitieuse l’apprit à ses dépens.

Car, les idoles et les devins, eux-mêmes manipulés adroitement par les commanditaires de Ranavalona (voir sur ce même blog les articles intitulés « La cour et le gouvernement malgaches du temps de la royauté », 1ère et 2ème partie, datés respectivement du 25 janvier et 31 janvier 2015), pouvaient l’en chasser, il suffisait pour cela de l’accuser d’une faute impardonnable ou d’un crime odieux quelconque.

Et, ce fut le cas du malheureux Andriamihaja, qui fut accusé de vouloir mener une politique personnelle et d’en influencer de trop la reine et, à cette fin, d’exercer sur les ministres et l’armée des « pressions inadmissibles » ! Accusations si dérisoires !…

C’est que lui, Andriamihaja, le jeune ambitieux, soupçonné de « modernisme » pour avoir été à l’école de Radama 1er, s’est ainsi progressivement fait beaucoup d’ennemis parmi les vieux ministres, parmi les traditionalistes et certains officiers jaloux de sa trop rapide ascension et qui, sans doute, ne supportaient plus la réussite de ce jeune à qui les étoiles souriaient de trop…

Pour faire mine de rendre justice aux yeux du peuple et de l’Histoire, les devins et idôles administrèrent à Andriamihaja le tanguin (poison d’épreuve judiciaire) – ce, conformément à la coutume !…- , auquel cependant l’outrecuidant résista miraculeusement !…

La superstition et la peur devant un tel message venu d’en-haut, autant que la prudence et l’hypocrisie, incitèrent donc les dignitaires du régime à non seulement laisser Andriamihaja en vie, mais – ô !, hauteur de sentiment ! – également à lui conserver son titre de Premier des ministres, sans qu’il soit cependant autorisé à exercer effectivement ses prérogatives, et en compensation il fut nommé Gouverneur d’Antananarivo et Coordonateur de l’Armée, fonctions au demeurant bien théoriques.

Andriamihaja fut aussi autorisé – oh !, grandeur d’âme ! – à voir la reine Ranavalona 1ère, réfugiée à Ambohimanga à la suite d’une maladie inexpliquée qui sera d’ailleurs mise sur le compte de Andriamihaja (or, ne fut-il pas logique de considérer que cette reine volontiers sentimentale était en réalité, et tout à fait naturellement, meurtrie jusqu’au plus profond d’elle-même du sort réservé à son amant du moment ?).

Après de tels forfaits, quand on apprit en octobre 1829 la mort violente de Andriamihaja personne n’en fut surpris.

Certains historiens disent qu’il avait été exécuté par la sagaie, tandis que d’autres avancent un empoisonnement par un autre prétendant amant de Ranavalona 1ère, Rainijohary, à la suite d’une violent dispute…

C’est que, en dehors de la plausible violente dispute évoquée ci-dessus, des accusations nouvelles (interception des lettres officielles, défaut de communication d’informations de haute importance, etc…), considérées comme tout aussi graves que celles ayant précédemment provoqué la mise à l’épreuve du tanguin de Andriamihaja, avaient été formulées.

Formellement, c’est Rabosela, chef du clan roturier des Voromahery qui, étant placé sous l’inspiration de Rainiharo, le nouvel « homme fort » du régime, avait prononcé ces accusations.

Ainsi d’une frappe impitoyable – par la sagaie ou par empoisonnement – fut réglé le compte de ce pauvre Andriamihaja, le « Favori de la Reine ».

Et ainsi prit fin le « règne » de Andriamihaja, dont le parcours politique, certes de très courte durée, aura été d’une grande intensité.

En fait, formé à l’école de Radama 1er mais épris de trop d’ambition personnelle, il personnifia la période dite de « transition » au cours de laquelle le nouveau régime mis en place par le vieux parti hova (roturier) avait encore quelques hésitations quant à l’orientation définitive à donner aux affaires étatiques.

Si Andriamihaja avait pu maîtriser son ambition et la diriger autrement en se souvenant des enseignements de Radama 1er, eût-il été celui par qui le règne de Ranavalona 1ère aurait pu s’orienter plus vertueusement ?

Un tel songe doit rester un songe, car du fait de la terrible et implacable mainmise des thuriféraires de la rétrogradation civilisationnelle sur tous les leviers, un tel homme habité par des sentiments somme toute légers n’aurait de toute façon pas pu – ou voulu – s’impliquer dans une cause qui de toute façon l’aurait dépassé.

Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo

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Reproduction, même partielle, interdite des textes et illustrations
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* Cet article s’inspire de mon ouvrage « La geste éphémère de Ranavalona 1ère, l’expédition diplomatique malgache en Europe, 1836-1837 », L’Harmattan, 1997.

UNE PAIX INTERNATIONALE DURABLE INTROUVABLE ?

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« Paravent façon japonaise » 2 – Acrylique sur papier doré – JPRA.

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                                   UNE PAIX INTERNATIONALE DURABLE INTROUVABLE ?

Les conflits de toutes natures prolifèrent sur la planète Terre à mesure que leurs causes se diversifient elles-mêmes à la source des antagonismes que les hommes savent s’inventer.

Si aujourd’hui d’aucuns redoutent une « troisième guerre mondiale » frontale entre des Etats, en réalité cette frontalité n’est qu’atténuée du fait de la dispersion géographique des conflits et de la nature indirecte de l’implication des Etats, mais leur multiplication saute aux yeux, ce qui confère à l’ensemble de ces conflits un caractère mondial.

Et ceci est d’autant plus vrai s’agissant du terrorisme international, qui est un ennemi intérieur autant qu’extérieur.

Contre lui spécifiquement, les instruments répressifs et de lutte existent bien et se diversifient pour une meilleure efficacité (cf. sur ce même blog l’article « A propos de Daesh : les notions et mots justes », daté du 16 novembre 2015).

Et d’une façon générale, s’agissant des Etats et des peuples entre eux, quoiqu’on en dise les instruments onusiens de paix et de maintien de la paix se trouvent renforcés en vue de ce qu’il convient désormais d’appeler : une « Paix durable ».

Mais alors, pourquoi tant de conflits et de menaces contre la Paix ?…

La Charte des Nations Unies reconnaît à chaque Etat, en son article 51, la légitime défense et donc le droit de belligérance en cas d’agression de la part d’un autre Etat. De son côté, pour protéger les populations, la Convention de Genève du 10 juin 1977, en son Protocole additionnel n° 1, définit l’état de conflit armé à caractère international quand il implique des Etats entre eux ou des peuples en lutte contre la domination coloniale ou contre des régimes racistes.

Dans tous les cas, c’est la Paix durable internationale qui est en jeu.

fleurs épanouies 9

« Fleurs épanouies » 3 – Acrylique sur papier doré – JPRA.

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                                   LA PAIX DURABLE, ENTRE REALITE ET ILLUSION

Les Nations Unies dont deux des missions premières sont la sauvegarde et le maintien de la Paix dans le monde ont, on le sait, la capacité de mobiliser à chaque fois que nécessaire une force de maintien de la Paix aux fins de cessez-le-feu et de séparation des belligérants pour faire place à un processus de recherche de solutions pacifiques.

Mais, tant la multiplication et la permanence des conflits que leur complexité croissante et les échecs enregistrés ont décidé le Secrétaire général des Nations Unies à prendre l’initiative en janvier 2013 de proposer au Conseil de Sécurité des missions plus globales et précises à la fois, sans doute plus innovantes également, pour les forces de maintien de la Paix missionnées à travers le monde, ce qui a effectivement été adopté par une « Résolution 2086 » du 21 janvier 2013 sous la présidence du ministre pakistanais des affaires étrangères dont le pays continue de fournir des contingents de militaires et de policiers au service de la Paix dans le monde.

Au-delà des deux types de missions rappelés plus haut, il s’agit que ces forces multinationales placées sous l’autorité et le commandement exclusifs des Nations Unies, tiennent pour objectif principal d’être en mesure de faciliter la mise en oeuvre des fondements d’une paix durable (associant Paix et Développement) entre les parties en conflit armé, et ce en ces termes :

« United Nations peacekeeping activities should be conducted in a manner so as to facilitate post-conflict peacebuilding, prevention of relapse of armed conflict and progress toward sustainable peace and development ».

Ceci veut dire qu’au-delà de ces forces onusiennes et de leurs missions spécifiques, il y aura à accompagner activement et parallèlement :

. la sécurisation d’opérations consistant à réintégrer d’anciens combattants à la vie civile ;
. la mise sur pied de dispositifs de sécurité nationale ;
. le renforcement de l’Etat de droit ;
. la mise en œuvre de processus de réconciliation et d’inclusivité politique ;
. la protection des civils et de leurs droits ;
. la restructuration institutionnelle ;
. l’aide humanitaire.

L’expérience onusienne réussie au Timor-Oriental a incité à cette réforme onusienne. Ce besoin de réforme a également largement bénéficié des dures expériences burundaise, libérienne et de la Sierra leone.

Il est évident que l’ampleur et la lourdeur de telles missions allant bien au-delà des capacités des seules forces onusiennes et de ce que les Etats ou organisations internationales associées pourraient individuellement ou collectivement offrir, une coordination sans faille de tous les intervenants est rendu plus que nécessaire et demande une direction et une gestion d’une grande rigueur impliquant une répartition claire des tâches.

A cet égard, la mobilisation des capacités onusiennes s’est traduite par le rapprochement opérationnel de l’important Département des opérations de maintien de la Paix de l’ONU et du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD).

D’autre part, afin de permettre aux pays concernés de participer aux décisions onusiennes et de prévenir tout risque de retour au conflit, une « Commission de la Paix » a été mise en place. Par ailleurs, sur le plan technique, la Banque Mondiale, les organisations régionales, les organisations spécialisées ainsi que les ONG sont également sollicitées.

Les dispositifs sont ainsi en ordre de marche. Mais, les réalités mouvantes du terrain, on le voit tous les jours, dépassent largement les prévisions.

Car par définition, les conflits actuels n’obéissent plus à des schémas déterminés et inévitablement les états-majors nationaux, internationaux et onusiens sont régulièrement pris de court devant la déferlante des forces d’agression émanant moins des Etats constitués que d’organisations téléguidées de près ou de loin par ces derniers.

Même les Etats dits « voyous » les redoutent à cause de leur capacité destructrice de l’ordre établi, de sorte que par nécessité sécuritaire d’étranges alliances se font désormais jour entre Etats « civilisés » et Etats « voyous » dans certaines régions infestées par la gangrène terroriste.

Par ailleurs, des guerres par procuration ou à visages couverts (cf. l’invasion récente de la Crimée), et des conflits potentiels de nature territoriale (cf. les Iles Spratley ou Kouriles – baptisées autrement par les Chinois et par les Japonais – en Asie orientale et septentrionale) caractérisent l’époque actuelle ; elles sont ainsi d’autant plus sauvages et meurtrières que ceux qui les couvrent n’ont de compte à rendre à quiconque.

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« Fleurs épanouies » 2 – Acrylique sur papier doré – JPRA.

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   UNE FORCE PERMANENTE D’INTERVENTION RAPIDE ONUSIENNE – LE FPIRO –

Devant la multiplication fulgurante actuelle des conflits armés de toutes natures, qui voient proliférer dangereusement des groupes armés incontrôlables qui risquent sérieusement de maîtriser les armes les plus terrifiantes, l’émergence d’une telle force permanente d’intervention rapide onusienne se justifie avec une urgence absolue.

Or, elle n’existe pas, et n’existera sans doute jamais si l’on ne fait pas l’effort de redéfinir les contours de la sacro-sainte notion de souveraineté étatique.

Le fait est qu’actuellement, seules existent des forces constituées occasionnellement avec des effectifs et des moyens dérisoires, soit décidées directement par le Conseil de Sécurité des Nations Unies et placées sous sa responsabilité directe, soit constituées par des accords spéciaux par des Etats alliés par des intérêts communs, soit encore constituées au niveau régional par des organisations régionales.

Dans la forme, tout ceci se conforme aux dispositions des chapitres VII et VIII de la Charte des Nations Unies.

Mais alors, on peut légitimement se demander pourquoi forts de ces dispositifs juridiques les Etats membres des Nations Unies qui, selon le Préambule de la Charte ayant créé l’Organisation du même nom, se sont engagés à « réprimer tout acte d’agression ou autre rupture de la Paix » et, ce faisant, « à unir nos forces pour maintenir la Paix et la Sécurité internationales », ne soient au fond jamais parvenus à utiliser à bon escient les pleines ressources de ces instruments juridiques et institutionnels en résultant ?

En fait la question, loin d’être naïve, pointe du doigt les incohérences et les lourdeurs du système d’intervention rapide des Nations Unies incarné par le Conseil de Sécurité, qui rend tout simplement non opérationnelles maintes initiatives exprimées ou souhaitées du fait de l’incapacité des Etats membres à s’entendre sur un strict minimum.

Et, ce ne sont pas les quelques résolutions ponctuelles décidées, soit par le Conseil de Sécurité, soit par l’Assemblée générale, qui seraient de nature à corriger ce triste constat. Soulignons d’ailleurs que l’Assemblée générale est institutionnellement privée de toute initiative dès lors que le Conseil de Sécurité s’est saisi prioritairement d’une affaire particulière en matière de maintien de la paix et de sécurité internationales (cf. article 24 de la Charte), ce aux termes de l’article 12 de la Charte des Nations Unies.

Or également, on sait que pour faire adopter au sein du Conseil de Sécurité une quelconque résolution urgente d’intervention rapide (qu’elle soit militaire, civile ou humanitaire…) au sens de l’article 24 précité, un vote unanime ou à une majorité qualifiée est requise, ayant souvent pour conséquence d’édulcorer quelque peu tout projet de résolution à lui soumettre afin qu’il ait le maximum de chance d’être adopté…

Et pourtant, en cas de mesures ou de solutions jugées « inadéquates » ou qui se soient révélées telles, le Conseil de Sécurité peut bel et bien, de sa propre initiative, entreprendre « toute action qu’il juge nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix et de la sécurité internationales », ce « au moyen de forces aériennes, navales ou terrestres » (article 42 de la Charte).

D’ailleurs, il dispose en permanence pour cela et afin de définir concrètement la stratégie d’action, y compris pour mettre en œuvre la combinaison des moyens, l’assistance et les facilités à fournir par les Etats pour l’emploi de ces forces, d’un Comité d’Etat-Major composé des chefs d’Etat-Major des membres permanents du Conseil de Sécurité (article 46 et suivants de la Charte).

Alors, comment se fait-il, pour ne prendre que ces exemples criants, qu’en tant que telles les Nations Unies soient si absentes – ou si peu actives – dans les nécessaires luttes pour éradiquer les terribles crimes commis par Al Quaïda, l’ « Etat Islamique » Daesh ou Boko Haram, qui se propagent partout, à telle enseigne qu’aucun Etat ne peut plus se considérer comme à l’abri ? (sur ce sujet : voir sur ce même blog l’article « A propos de Daesh : les notions et mots justes » daté du 16 novembre 2015).

A la lumière de ces défis, les Nations Unies ne peuvent plus s’abriter derrière la sacro-sainte souveraineté des Etats ; elles ont un mandat général et permanent qui leur permet de prendre toutes les initiatives adéquates et de directement s’arroger le droit d’intervention rapide sans se sentir obligées d’agir par le seul truchement des Etats.

La Paix durable doit se doter d’une force à la hauteur de ses ambitions.

Et, tant à titre de dissuasion que d’être en capacité de frapper préventivement, ceci doit se traduire concrètement et urgemment par la constitution de cette sorte de « Force Permanente d’Intervention Rapide Onusienne » (FPIRO) que nous préconisons.

Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo

Reflexions soutenues par « FOCUS CHINE – YING & JP ASSOCIES »

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DISPOSITIONS PERTINENTES DE L’ACCORD UNIVERSEL SUR LA LUTTE CONTRE LE RECHAUFFEMENT DE LA PLANETE TERRE

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« Paravent façon japonaise » – Acrylique sur papier doré – JPRA


L’Humanité tout entière est, depuis au moins une décennie, saisie par une préoccupation permanente et lancinante: le réchauffement climatique, les bouleversements et les ruptures qui en résultent.

C’est plus que notre mode de vie, fondé sur l’illusion de compter sur la disponibilité inépuisable des ressources du sol, qui doit être mise en cause; c’est assurément tout l’écosystème économique qui demande à être revu.

Ce n’est qu’au bout d’un long processus de rapprochement que les Etats ont enfin réussi à se mettre d’accord sur un cadre.

de quoi s’agit-il ?

DISPOSITIONS PERTINENTES DE L’ACCORD UNIVERSEL SUR LA LUTTE CONTRE LE RECHAUFFEMENT DE LA PLANETE

Le 12 décembre 2015 est à marquer d’une pierre blanche.

La Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, adoptée à New-York le 9 mai 1992, apporte en effet, 23 ans plus tard, un développement – enfin ! – significatif et « engageant » à défaut d’être « contraignant ».

SUR LE FOND

Les 195 pays présents à la COP21 de Paris ont en effet d’adopté le 12 décembre 2015 le texte tant attendu fixant à moins de 2°c l’augmentation de la température, et autant que faire se peut à moins de 1,5°c, afin d’assurer à la planète Terre et aux hommes qui y habitent une viabilité actuellement menacée.

Sont décidées tout spécialement:

. la transition vers des sources renouvelables d’énergie,

. la décarbonisation progressive,

. et l’aide aux pays en développement avec une enveloppe fixée ad minima à 100 milliards de dollars par an pour y parvenir.

A ces égards, les parties à la Convention étaient instamment invitées à communiquer, à l’horizon 2020, au Secrétariat leurs stratégies de développement à faible émission de gaz à effet de serre à long terme pour le milieu du siècle…

Un Organe Subsidiaire de conseil scientifique et technologique est créé pour élaborer et recommander des règles, modalités et procédures pour la mise en oeuvre d’un mécanisme pour le développement durable et pour le transfert de technologies socialement et écologiquement rationnelles.

Les 100 milliards de dollars destinés annuellement à l’aide au pays en développement gérés par le Fonds Vert pour le climat et par le Fonds pour l’environnement mondial, et ce avec le concourt du Fonds pour les pays les moins avancés et celui du Fonds spécial pour les changements climatiques.

Quant au renforcement des capacités à mettre en oeuvre les objectifs communément adoptés lors de la COP21 à Paris, un plan de travail pour la période 2016-2020 est établi, en particulier dans les pays en développement.

A PROPOS DE LA NATURE JURIDIQUE DES ENGAGEMENTS PRIS

Afin de lever toute ambiguïté dans l’interprétation de la portée des engagements pris, il convient de souligner ce qui suit.

L’Accord intervenu à Paris lors de la COP21 se résume juridiquement en droit international – sans en minimiser la portée, effectivement, « historique » – en une adoption d’un texte décisionnel et engageant, qui se traduit notamment par le fait qu’aucune réserve à son entrée en vigueur n’est acceptée. C’est dans ce sens que certains ont cru devoir qualifier le texte adopté de « juridiquement contraignant ».

Mais, formellement il n’en est rien car en l’état ce texte ne crée aucune obligation ni, a fortiori, n’impose aucune contrainte, ce en dépit du fait que les parties se sont engagées sur des objectifs précis et, pour certains, chiffrés.

Par contre, s’étant ainsi engagées les parties s’obligent, selon les termes de la convention internationale sur le droit des traités, à appliquer de bonne foi les termes et dispositions de l’accord auquel elles ont souscrit.

A cet égard, deux points essentiels de forme, qui pour le coup influent sur le fond, doivent  attirer l’attention quant à l’entrée en vigueur de cet Accord historique, laquelle obéit à trois étapes formelles.

En premier lieu, cet Accord adopté par l’assemblée des délégués des pays parties à la convention onusienne à Paris, devait encore recevoir la signature formelle des pays au siège de l’ONU à New-York, ce durant une période comprise entre le 22 avril 2016 et le 21 avril 2017.

C’est donc actuellement chose faite.

Ensuite, dès que 55 pays signataires représentant au moins 55% des émissions totales des gaz à effet de serre auront apposé leur signature respective au siège de l’ONU, l’Accord est prévu d’entrer en vigueur.

C’est également chose faite.

Mais, en tout état de cause, les stratégies de développement à faible émission de gaz à effet de serre ne pouvaient intervenir effectivement qu’après le 1er janvier 2020, une fois que toutes les parties les aient, chacune, déposées au Secrétariat de la Convention.

Enfin, un autre point mérite qu’on s’y arrête.

Très clairement, on peut d’autant moins parler de « caractère contraignant » qu’aucun mécanisme juridique ou formel spécifique n’a été décidé, autre qu’un dispositif d’observation et de révision – en hausse – des engagements initialement pris, ainsi qu’un suivi et un bilan tous les 5 ans des résultats escomptés…

Cependant, malgré ces « atténuations », comme on dit en forme de litote, c’est tout de même un bon début… !

Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo

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SE RESSAISIR ET ELEVER LA CONSCIENCE

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« Fleurs épanouies » – Acrylique sur papier doré – (jpra).


                 SE RECADRER POUR SE RESSAISIR ET ELEVER LA CONSCIENCE

Comme si les ravages de la pandémie de la Covid-19 et les désastres environnementaux ne suffisaient pas à flétrir notre conscience, voilà qu’ils l’exaspèrent sur un autre terrain, celui d’attiser la peur d’autrui et qui se traduit sur d’autres champs.

Mais, c’est aussi la déstructuration mentale qu’il faut déplorer et condamner avec fermeté. Nous voulons parler, pour ni citer que ces exemples, des délits et crimes commis au nom de certaines religions ou croyances supposément libératrices, lesquelles sont en réalité déformées, instrumentalisées et violées pour des causes qui n’en sont pas mais qui sont faussement affirmées par des vauriens.

Par ailleurs, il faut tirer les leçons de la montée vertigineuse des idéologies extrêmes en France, comme ailleurs en Europe ou sur d’autres continents. Elle donne à réfléchir et, surtout, à réagir et à agir. Il en est de même à l’encontre de tous les extrêmes et idéaux extrêmes, nourris par une exacerbation de ce curieux mais dangereux sentiment identitaire servi comme étant une panacée face à autrui.

Nos civilisations d’ici ou d’ailleurs, quelles que soient leurs origines géographiques et les fondations sur lesquelles elles sont assises pourvu qu’elles génèrent d’authentiques valeurs référentielles générées par l’étique, la morale et le sens éminemment humain, savent précisément ce que sont la hiérarchie des valeurs et l’échelle desdites valeurs devant chaque situation.

Nous devons donc savoir comment réagir et agir, dans l’exigence morale et éthique. Et en cela, notre foi vécue dans la sincérité du coeur et de l’esprit doit nous y aider.

Surtout quand il s’agit d’un homme ou d’une femme politique qui veut caracoler aux plus hautes fonctions de l’Etat et s’y maintenir. Il, elle, se doivent, comme un ardent devoir, de toujours élever le débat, de cultiver la noblesse de l’âme et des mots, de peaufiner un discours de référence, et ne point se contenter de formules de complaisance et de rester au raz des pâquerettes.

Caresser – voire enfiévrer – l’électorat dans le sens du poil, c’est-à-dire en fait et dans l’occurrence du moment, à faire plaisir aux bas sentiments des gens, c’est verser dans l’irrespect et les considérations les plus sulfureuses ; c’est encourager les relents populistes, séparatistes, asociaux et racistes d’une frange grandissante d’une population aigrie, ce au détriment de la cohésion nationale et de la considération que chacun se doit de garder vivace dans son comportement vis-à-vis de tous.

Mais, si la classe politique est à ce niveau c’est aussi, et principalement, parce que l’électeur lui-même recherche dans son inconscience la médiocrité, comme pour se rassurer d’appartenir à la masse.

Or, si l’on n’y prend pas garde la banalisation des bas sentiments et de la haine de l’autre, nourrie par les frustrations économiques et sociales qui poussent à des réflexes de repli sur soi, la classe politique finira par se peupler dangereusement et majoritairement d’éléments oublieux des leçons de l’Histoire et adeptes d’un prétendu « parler vrai » et d’une non moins prétendue « attitude décomplexée ».

Et, c’est fort malheureusement le cas actuellement…

Alors, que faire ?

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« Regards de mépris » – Crayon – 1962 – (jpra)


                                             LA REVOLTE DES CONSCIENCES

Voulons-nous une société de méfiance, de délation et de culte du mépris ?

Bien sûr que non ! Alors, réagissons.

Tout d’abord, admettre que l’érosion des consciences, mue par les élans populistes friands de visées matérialistes, et façonnées par le consumérisme ambiant ou la volonté de domination, y compris dans les idées supposées en vogue, masquent la vraie nature des problématiques sociales qui sont aujourd’hui allègrement requalifiées dans des considérations raciales, ethniques ou religieuses, et le monde du sport lui-même s’alimente trop souvent à la source des comportements cocardiers pour déborder inévitablement dans la castagne.

Les exemples concrets de raisonnements expéditifs fondés sur un égoïsme triomphant ne manquent pas :

. l’insécurité et la criminalité sont nécessairement le fait d’immigrés ; les immigrés ne font que profiter des avantages sociaux au détriment de ceux qui travaillent ; la considération des origines ethniques ou religieuses commence subrepticement à refaire son apparition dans certains documents administratifs pour mieux catégoriser les « populations à risque »; les stades deviennent de vastes défouloirs racistes pour peu que des gens de couleur s’y produisent ; l’« homogénéité ethnique » est recherchée comme étant une panacée pour être entre soi ; etc…

Mais, arrêtons ici pour ne pas verser dans la litanie.

Par contre, que les consciences se révoltent !

Car, le succès des partis extrémistes, qui profitent de la démission des consciences intellectuelles ou spirituelles, ne se limite plus aux classes défavorisées, il gagne toutes les couches sociales, et certains idéologues revisitent ouvertement les thèses nazie, fasciste ou radicale qui, en leur temps, faisaient les beaux jours des régimes de terreur et du triomphe nationaliste.

A côté de ce fléau extrêmiste, il y a aussi les porteurs de la cupidité, de l’imbécilité et de l’ignorance, volontaires ou pas…Dans la galerie des hommes de pouvoir, sur quelque continent que ce soit, il y a surpopulation ! C’est plus qu’inquiétant. C’est désespérant…surtout quand ces hommes-là sont à la tête des plus grandes ou des plus influentes puissances du moment.

Ce sont là le résultat de l’érosion des consciences, du déficit culturel, du culte de la puissance, de l’illusion identitaire, et de la banalisation de la médiocrité, contre lesquels de moins en moins de professionnels de la politique politicienne, lesquels se mettent de plus en plus en marge de la catégorie des authentiques « politiques », se sentent concernés.

S’écartant de plus en plus du cercle de l’authentique « gente politique », ils ne pensent qu’à constituer et à renforcer ce qu’ils considèrent comme leur clientèle politique.

Et à cette fin, leurs armes préférées sont le marketing et la communication, pourvu seulement qu’ils leur permettent de coller aux grandes tendances contingentes de l’électorat, de même qu’ils sont en permanence en chasse pour se constituer des fiefs électoraux.

L’ART DE L’ESPERANCE VRAIE – HARO SUR L' »HOMO CONUS » ET LA CONNERIE UNIVERSELLE

Ceux qui veulent élever le débat et se ressaisir pour ouvrir des perspectives sont ainsi happés par ces pratiques de captation et par les phénomènes de masse et d’uniformisation.

Mais loin de se décourager, ils se doivent de persister de plus fort dans le rappel, la promotion et la défense des valeurs, en particulier celles de la simple considération des uns et des autres, celles de la Démocratie qui se nourrit à la source des valeurs, de la morale et de l’éthique, bien sûr, et non uniquement à celle d’une « légalité » beaucoup trop souvent instrumentalisée ou orientée.

Cela consiste à élever les consciences, à cibler le cœur des nécessités, à ne pas oublier les leçons de l’Histoire, à faire évoluer les traditions et à valoriser toutes les formes de l’humanisme, à travailler la centralité de l’Homme, et à savoir avec discernement où se trouve l’échelle des valeurs.

Il n’est pas un seul sujet qui doive échapper à cette pensée humaniste, laquelle doit se traduire dans l’action et ne point rester dans l’incantation.

Pour ne prendre que deux exemples :

. le sentiment national n’est pas l’apanage du nationalisme, ni, surtout pas, d’un parti politique quel qu’il soit, par contre il l’est du patriotisme ;

. les civilisations meurent dans l’isolement, mais au contraire prospèrent dans leur capacité à assimiler les apports exogènes.

A ces égards, affirmons que la notion de progrès, actuellement curieusement absente des discours, n’est pas une vilaine référence !

Au contraire.

Par contre, ne mélangeons pas nécessairement « progrès » avec une certaine technologie envahissante, celle en particulier qui voudrait voir dans l' »intelligence artificielle » appliquée à tort et à travers un « pas révolutionnaire » pour soit-disant libérer l’homme. Jusqu’où la bêtise humaine serait-elle prête à aller ?… Après l' »Homo faber », l' »Homo sapiens », gardons-nous bien de laisser naître et prospérer sur Terre l' »homo conus » … !

Le paradoxe, à ce sujet, est qu’à l’ère de la connaissance, qui s’avère infinie tant les voies et moyens qui y mènent sont légion grâce notamment à la recherche et à la technologie, qui fait dire à certains – et de les convaincre – de l’existence d’un illusoire « homo Deus », il est un fait avéré que la connerie va de pair puisque la conscience et le sens éthique des hommes s’amenuisent d’autant.

Pour l’anecdote, et sans vouloir lui faire de la publicité, je me suis jeté sur un récent ouvrage intitulé « Histoire universelle de la connerie » (Editions sciences humaines, 2019) qui réunit sous la direction de Jean-françois Marmion une trentaine d’historiens qui nous content sur près de 500 pages les vérités nues et biscornues de cette mauvaise fée aux mille visages qu’est la connerie humaine, du Néolithique à nos jours…!

Edifiant !

Alors, il faut se ressaisir ! Et retrouver le coeur de la Vie, ce pourquoi fondamentalement notre vie sur Terre doit avoir du sens.

Que ce soit dans la philosophie linéaire chère à la chrétienté ou dans celle de la pensée chinoise ou asiatique des évolutions cycliques, le genre humain ne conçoit son devenir que dans l’avenir, mais pour que cet avenir ait un sens, le devenir doit s’alimenter des sèves porteuses d’Espérance et non d’un simple espoir matériel.

Le proche XXème siècle nous a apporté des icônes incontestées en la matière.

Ils portent les noms évocateurs de De Gaulle pour l’effort sur soi et le refus de l’abandon devant l’ignominie ; de Churchill pour l’abnégation et le sacrifice patriotique ; de Mandela pour le pardon et la réconciliation des hommes ; de Gandhi pour le culte de la non-violence et du don ; et de Kennedy pour repousser le carcan des frontières afin que vive la Liberté.

Autrement dit, si la politique veut atteindre sont but, il se doit fondamentalement d’être un art de l’Espérance vraie, qui se traduit par un sentiment et une réalité de plénitude existentielle, et ne pas se limiter à la matérialité des choses qui, en effet, se caractérisant par l’exclusivité et l’instantanéité, tend inexorablement à maintenir la politique au raz des pâquerettes.

Et puis, sans chercher loin, mieux apprendre à « vivre ensemble » ne constitue-t-il pas la moindre de l’attitude civique, comme la simple civilité dans le comportement de tous les jours et la considération réciproque ?

Oui : la civilité !

Tout simplement, mais toute la civilité ! 

Il est sidérant de constater qu’une telle notion basique de l’humain vivant en société, qu’une telle valeur première que l’on voudrait considérer comme innée, perde du terrain et devienne étrangère à tant de gens…

Oui, mille fois oui, ressaisissons-nous et élevons notre conscience !

Nous le valons-bien…

Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo

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LA PERSONNALITE ATTACHANTE DE RANAVALONA III, LA DERNIERE REINE DE MADAGASCAR

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La reine Ranavalona III (1883-1897). Elle porte la grand’croix de l’ordre royal de Madagascar. Sur le guéridon est posée sa couronne aux sept fers de lance, attributs de la royauté malagasy. Mélancolique et effacée, elle incarne l’excellente éducation chrétienne.


LA PERSONNALITE ATTACHANTE DE RANAVALONA III, LA DERNIERE REINE DE MADAGASCAR

Ranavalona III, la dernière reine de Madagascar ne laisse personne indifférente, ni à Madagascar ni ailleurs, en particulier en France.

C’est que, sous des traits doux et animée d’une personnalité attachante et à bien des égards exquise, la dernière souveraine malagasy, nullement préparée aux affaires publiques, se trouvait bien malgré elle tenaillée dans les affres de si tragiques évènements tant internes qu’externes, par lesquels cheminaient par fissures successives et profondes sa vie et la destinée de Madagascar et des Malagasy.

Nous n’abordons pas ici les évènements qui ont émaillé son règne, ceux-ci étant relatés et évalués dans notre article intitulé « Réformateurs et modernisateurs de Madagascar, 9ème et 10ème parties » datés des 16 et 17 oct. 2013 (cliquer sur la rubrique « Archives » puis à « Octobre 2013 »).

Nous nous concentrons ici uniquement sur la personnalité de la princesse Razafindrahety, née le 22 novembre 1861, accède au trône de Madagascar le 13 juillet 1883 et couronnée Reine Ranavalona III le 22 novembre 1883.

UNE EXCELLENTE EDUCATION CHRETIENNE

Au départ, Razafindrahety était sous la protection très affectueuse de sa tante, la très chrétienne reine Ranavalona II qui fit, avec son Premier ministre et non moins époux Rainilaiarivony, de la religion protestante une religion d’Etat.

La jeune princesse reçut donc, comme toutes les autres princesses de la famille royale, une bonne éducation chrétienne. Ainsi Razafindrahety fut-elle baptisée le 5 avril 1874 par le pasteur Rainimalanjoana.

Toute cette jeunesse royale, insouciante et gaie, fréquentait la grande école située à Ambodin’Andohalo au nord du Rova, sous la direction de la très stricte Miss Bliss, une gouvernante dévouée bien dans la tradition britannique. Toutes ces écolières recevaient les mêmes leçons, puisées dans la morale évangélique, destinées à les éclairer sur leurs devoirs d’épouses et de mères chrétiennes et à leur donner le moyen de les accomplir.

Cependant en classe, Razafindrahety et ses petites camarades princesses comme elle, aveint leurs places spéciales, sur une sorte de tribune. Le chant prenait une grande place dans l’enseignement, et de beaux chœurs à quatre voix s’élevaient au moins deux fois par jour pour s’entendre au loin.

Pour parfaire l’éducation de ces jeunes filles, des séjours fréquents étaient organisés chez Madame Sibree, l’épouse de l’architecte et savant anglais qui fut choisi pour construire les temples commémoratifs devant marquer à jamais l’enracinement de la chrétienté à Madagascar après les dramatiques persécutions du règne de Ranavalona 1ère (voir sur ce même blog l’article « Réformateurs et modernisateurs de Madagascar, 4e et 5e parties », cliquer sur la rubrique « Archives, puis à « octobre 2013 »).

La grande distinction de cette dame Sibree, son équilibre moral et familial, ses studieuses habitudes et son ordre domestique la destinaient particulièrement à servir d’exemple pour les princesses royales malagasy.

UN DESTIN INATTENDU, INCERTAIN ET FRUSTRATOIRE

Et dans ce milieu quelque peu compassé et strict, Razafindrahety se distinguait par son étourderie et ses rêvasseries. Elle était peut-être la dernière qu’on put se représenter revêtue de la majesté royale.

Et pourtant, c’est elle qui fut choisie, de préférence à sa sœur aînée Rasendranoro, forte fille peu favorisée par la nature, pour succéder à Ranavalona II comme Reine de Madagascar sous le nom de Ranavalona III.

A 20 ans, Razafindrahety avait toute la grâce de la jeunesse, le teint clair sur une peau douce, les yeux d’un noir limpide, la physionomie mobile, les attaches fines, le tout sur un corps de taille moyenne cependant très favorablement proportionné.

En mai 1883, peu avant son accession au trône de Madagascar, les intrigues se nouaient déjà, et rapidement, autour de la jeune princesse Razafindrahety, tôt pressentie par les yeux gourmands du Premier ministre, l’omnipotent et puissant Rainilaiarivony, qui bien que n’étant point prince ni prince consort puisque de condition roturière, se cherchait prestement une autre épouse, jeune de préférence, pour succéder à une Ranavalona II sur la fin de sa vie, mais aussi pour s’assurer, espère-t-il en secret, une descendance mâle…

L’accomplissement de ce dessein s’aide d’une « nécessité » qui n’a sans doute ainsi rien à voir avec le hasard.

Car, par coïncidence le mari de la princesse Razafindrahety, le nommé prince Ratrimo, meurt, paraît-il emporté par une maladie, cependant au diagnostic incertain.

Immédiatement, la raison d’Etat inspira au Premier ministre Rainilaiarivony sa décision d’épouser la jeune princesse Razafindrahety, ce même au grand mécontentement de la cour et du peuple, qui tous voyaient dans cette alliance « déséquilibrée » entre une jeune femme d’à peine sortie du début de ses 20 ans et un vieil homme de plus de 60 ans une obscure manœuvre politique…pour ne pas dire plus.

Mais, Rainilaiarivony fonce, plein de certitude, de suffisance, convaincu d’agir ex professo pour le bien des siens d’abord et de Madagascar ensuite, bien ancré dans sa ferrure. Mais quant à elle, voici Razafindrahety prise au piège, mais en désespoir de cause personnelle, se peut-il qu’elle veuille alors se poser en garante de la continuité dynastique ?

Le 13 juillet 1883 elle accède au trône de Madagascar sous le nom de règne de Ranavalona III.

Quant à son couronnement, le Premier ministre Rainilaiarivony en fixe la date pour « sa » reine au jour anniversaire de la jeune souveraine, le 22 novembre 1883. Ce sera également à cette date du 22 novembre qu’est fixée la Fête du Bain, rite de bénédiction royale, de purification et d’actions de grâce.

Elle n’a que 22 ans.

Les cérémonies du couronnement se déroulent avec la pompe et la solennité habituelles autour de la pierre levée sacrée d’Andohalo. La jeunesse des écoles prend part à la grande parade : tandis que 400 garçons armés de fusils font des démonstrations guerrières dans une chorégraphie strictement réglée, 400 filles défilent, abondamment fleuries.


Ci-dessous: la couronne de Ranavalona III aux sept fers de lance (représentant les sept maisons princières et royales de Madagascar), surmontée du Voromahery (aigle royal). – (Photo appartenant aux archives de la famille Razafy-Andriamihaingo, reproduction interdite -)***.

couronne de ranavalona III

ranavalona la belle

Ranavalona, la belle. Elle comptait parmi ses visiteurs de marque étrangers de nombreux admirateurs.


LE MAINTIEN D’UNE FEMME

Les apparences sont sauves, et Ranavalona III tient son rôle avec dignité et perfection, mais à l’intérieur le ver travaille et ce sont les piliers de l’édifice qui petit à petit pourrissent.

Deux faits, alors insignifiants mais qui tiennent lieu de présages dans leur interprétation plus tard, sont relevés lors même du couronnement de Ranavalona III.

Tout d’abord, dans sa proclamation, sans aucun doute inspirée par son époux de Premier ministre, Ranavalona III déclare :

« Je ne cèderai jamais aux Français la moindre parcelle du sol malgache, non !, même pas pour y planter un grain de riz ! »

Paroles vaines dont le caractère incantatoire prend un relief particulier face aux périls du moment, et d’ailleurs bientôt démenties par les graves évènements de cette guerre larvée avec la France dont la désastreuse gestion incombe exclusivement au seul Rainilaiarivony (sur les faits saillants, voir sur ce même blog les articles « Réformateurs et modernisateurs de Madagascar, 9ème et 10ème parties » – cliquer sur la rubrique « Archives », puis à « Octobre 2013 »).

Ensuite, après avoir posé le pied sur le roc sacré en remontant sur l’estrade royale, Ranavalona III laisse malencontreusement glisser sa lourde couronne, laquelle tombe et roule à terre ! L’émoi de tout un peuple, dont les annales se gardent bien d’en relater la réalité, se fait sentir. Ce fut là, sans doute, une malheureusement illustration de l’étourderie dont la jeune princesse devenue adulte n’avait pu se débarrasser…

Mais, les évènements ultérieurs, ceux de la déchéance d’une reine qui ne le méritait nullement, donnent rétrospectivement et assurément à ce fait une signification particulière.

La délitescence du royaume s’annonce-t-elle ainsi avec prématurité ?

Ce n’est pourtant pas du fait personnel de Ranavalona III qui, au contraire et malgré les malencontreuses occurrences relevées plus haut, a une conduite morale et spirituelle exemplaire. Par contre, le ver, encore lui, travaille de façon insidieuse son art destructeur…

Il est alimenté par les intempérances, les turpitudes, les mesquineries et les indécrottables défauts et fautes de gouvernance d’un Rainilaiarivony que l’avancée en âge accentue.

vue sur la salle du trône

Vue sur la salle du Trône du Palais Manjakamiadana, dans son état en 1953 après restauration des lieux. (Photo tirée de l’ouvrage « Colline sacrée des souverains de Madagascar, le Rova d’Antananarivo » de Suzanne Razafy-Andriamihaingo, L’Harmattan, 1989. (Reproduction interdite)***.


Or, Ranavalona III avait acquis de ses nombreux contacts avec les dames européennes les plus distinguées une science de l’harmonie et des élégances discrètes, que ses propres prédispositions et penchants lui inspiraient déjà.

Cela se voyait notamment au Palais « Manampisoa » au Rova d’Antananarivo dans le petit salon Louis XV, aux sièges légers, frais, coquets, recouverts de soie blanche brodée de bouquets de myosotis et s’ouvrant sur une claire véranda vitrée. On y remarquait aussi une belle table de boule aux cuivres étincelants, un tapis d’Arras et un lustre de Venise.

Ranavalona III s’habillait comme une vraie parisienne. Dans ses réceptions intimes, son époux, son Premier ministre, se tenait debout à côté du fauteuil royal. Il répondait généralement lui-même, à sa façon facile, poétique parfois, imagée souvent, aux salutations, compliments et hommages adressés à la Reine.

Bref, notre dernière Reine était issue de la meilleure école qui soit. Ses condisciples étaient généralement intelligents, travailleurs et doués d’un caractère sûr. Les meilleurs d’entre eux furent envoyés dans les universités européennes où ils purent compléter une formation débutée à Madagascar même. Ainsi de Randrianaly, qui épousa par la suite la princesse Rasendranoro, sœur de la reine Ranavalona III, et de Rajaonah, qui devint le gendre du Premier ministre.

L’un et l’autre suivirent de brillantes études médicales à l’université d’Edimbourg. D’autres allèrent à Londres, ou à Stavanger en Norvège, approfondir des études de théologie ou prendre des grades universitaires. Car, à cette époque-là, étant donné les très mauvaises relations que Madagascar entretenait avec la France, il ne fut pas question d’y envoyer des étudiants.

Cependant paradoxalement, c’était la France elle-même qui vouait à la personne de Ranavalona III une considération certaine. A titre d’exemple, pour le couronnement de Ranavalona III le Président français Sadi Carnot lui offrit un magnifique diadème de cérémonie garni de brillants et dont le centre est formé par un médaillon émaillé représentant la couronne et les armes royales, le tout surmonté d’un piquet d’aigrette blanche.

En plus, le même président de la République française avait offert à Ranavalona III : une tournure en satin rouge avec traîne dite « la balayeuse », également brodée de couronnes en fines perles, réalisée par la Maison Lemoine ; une ombrelle de cérémonie en dentelle de Chantilly rouge au manche en ivoire incrusté du chiffre en or de Ranavalona III ; etc… !

Et certes, dès 1885 et en vertu du traité de paix franco-malagasy du 17 décembre 1885 qui établissait à Madagascar un régime conduisant inexorablement à un protectorat avec la cession de Diego-Suarez à la France et le paiement d’une somme substantielle à titre d’indemnité en dédommagement de la confiscation des biens de Jean Laborde et de quelques autres Français, un drapeau tricolore malagasy correspondant fut créé mais portant le chiffre royal « R.M Ranavalona-Manjaka » (« Ranavalona Reine »).

A ceci s’ajoute que le 20 novembre 1888, la reine Ranavalona III reçut la dignité de Grand’Croix de l’Ordre de la Légion d’Honneur avec le grand cordon correspondant. A une telle très haute considération est venu en juste retour l’octroi en mars 1896 au Président de la République française Sadi Carnot de la dignité de Grand’Croix de l’Ordre Royal de Madagascar que la reine Ranavalona III venait de créer début de cette même année-là ! (cf. sur ce même blog notre article du 15 mars 2014 intitulé « Ordres royaux de Madagascar »).

Elégante entre toutes, la dernière reine de Madagascar commandait ses toilettes principalement en France et les personnalités européennes qui avaient le privilège de lui rendre visite s’accordaient tous à reconnaître sa grande distinction.

C’est ainsi qu’en 1895, au sortir d’une audience, le général Metzinger, le vainqueur de la campagne d’Antananarivo avec ses éléments avancés, écrivait : « La reine, elle, se contentait de s’habiller bien, de faire venir ses toilettes de Paris, des maisons Worth ou Doucet ».

diadème de ranavalona III

Quelques joyaux de Ranavalona III: Diadème or et corail massif; collier or et corail massif; boucles d’oreilles corail. (Photo tirée de l’ouvrage « Colline sacrée des souverains de Madagascar, le Rova d’Antananarivo », de Suzanne Razafy-Andriamihaingo, L’Harmattan, 1989. (Reproduction interdite)***.


DE FISSURES EN LEZARDES, ET FACE A LA DELITESCENCE DU ROYAUME, LA REINE OPPOSE SA DIGNITE

En fait, dès le début janvier 1886 c’est une France en qualité de tutrice de la nation malagasy qui enserre tout le pays dans ses griffes, avec un Rainilaiarivony dépassé par les évènements ; une situation cautionnée par la grande rivale Angleterre en 1890, cette même année où face à l’insécurité générale qui règne dans la capitale royale, même les projets architecturaux placés sous la maîtrise d’œuvre de l’architecte français Rigaud sont ajournés, cas notamment du Palais « Masoandro » cher à Ranavalona III, resté en l’état de fondations.

Finalement, protestant contre le refus du gouvernement malagasy de signer un autre traité établissant un protectorat pur et simple sur Madagascar, le Résident général français quitte Antananarivo en amenant le drapeau français en octobre 1894.

Les actes guerriers s’accélèrent donc, et les désastreux développements des opérations militaires voient s’égrener et s’afficher les fatales erreurs stratégiques de Rainilaiarivony, les défauts tactiques des généraux et le manque de combativité des soldats (cf. « Réformateurs et modernisateurs de Madagascar , 9ème et 10ème parties »).

Devant les reculades et défaites successives de ses armées face au corps expéditionnaire français dont les éléments avancés approchent dangereusement la capitale royale, la reine Ranavalona III ne peut alors s’empêcher de fondre en larmes tout en s’écriant : « C’en est fait, mon royaume est déchiré !».

Le Premier ministre Rainilaiarivony est aux abonnés absents tout en refusant que le prince Ramahatra, généralissime auréolé de victoires passées, prenne le haut commandement de ce qui reste d’armées royales pour opposer à l’ennemi la résistance et le sursaut.

Car, il estime qu’en cas de réussite ce prince-général en profite pour le supplanter à la tête du gouvernement…

Dès lors, le Rova lui-même est maintenant sous le feu nourri des canons français. Mais, la reine reste lucide et prend les choses en main.

Pour éviter le massacre de son peuple, à 15h30 de ce 30 septembre 1895 elle fait hisser le drapeau blanc sur le palais Manjakamiadana et amener le pavillon royal.

armée royale

L’armée royale à la manoeuvre. Cette armée d’environ 45.000 hommes ne comptait que quelques milliers de soldats valeureux, spécialement affectés à l’artillerie et à la garde du Palais royal. Elle n’a pas pesé lourd devant les 18.000 hommes de la force expéditionnaire française commandée par le général Duschesne. (Photo tirée de l’ouvrage « Colline sacrée des souverains de Madagascar, le Rova d’Antananarivo », de Suzanne Razafy-Andriamihaingo, L’Harmattan, 1989. (Reproduction interdite ).


Fin certes sans gloire, mais des vies humaines et le patrimoine sont saufs. Le général Duchesne, commandant du corps expéditionnaire français, présente à la reine Ranavalona III un traité établissant formellement le protectorat français à Madagascar.

Rainilaiarivony est démis de ses fonctions et est remplacé par Rainitsimbazafy.

Aussitôt, se soulève la révolte des patriotes, lesquels se constituent en légion armée : les « Menalamba » (« ceux à l’étoffe rouge »).

La reine Ranavalona III est, tout naturellement, leur figure de proue, mais tant par souci d’apaisement que fidèle à ses références chrétiennes, celle-ci se garde d’attiser le feu bien que son cœur, son esprit et son âme souffrent terriblement de la grande peine des siens. Son devoir est, par ailleurs, de maintenir debout l’ossature d’un royaume certes en danger mais qui doit demeurer debout.

prince ramahatra

Prince Ramahatra.


Ranavalona III reste donc Reine, protectrice des Malagasy, personnification de l’identité collective, rempart de l’héritage civilisationnel, à qui, autant par égard que par déférence, le résident-général français remet au nom du Président de la République française et de son gouvernement un magnifique et imposant collier de diamants.

Et ce, malgré qu’une loi du 6 août 1896 proclame « colonie française l’île de Madagascar avec les îles qui en dépendent » ; ce, malgré que la France envoie comme nouveau résident-général le général Gallieni, le « pacificateur » annoncé de Madagascar, à qui d’ailleurs non sans grandeur et dignité la reine Ranavalona III réserve le 29 septembre 1896 à ce fameux général, qu’elle qualifiera plus tard de « masika » (« méchant »), une réception solennelle au Palais Manjakamiadana sous les apparats des grands jours et la résonance d’une salve de vingt et un coups de canon ; ce malgré que la cour et le commun des sujets de la reine soient dans la torpeur de lendemains de braise ; et ce malgré …

cérémonie du fandroana

Le général Duschesne et ses officiers sont aspergés, par la grâce de la reine Ranavalona III, des eaux bénites du rituel du fandroana (cérémonie du bain) au Palais Manjakamiadana du Rova. Dessin de Bombled. (Photo tirée de l’ouvrage « Colline sacrée des souverains de Madagascar », de Suzanne Razafy-Andriamihaingo, L’Harmattan, 1989. (Reproduction interdite).


Car, la dure réalité des choses, le cours de l’histoire, eux, répandent leurs mauvaises coulées.

Ce d’autant plus que Ranavalona III n’a pas le caractère énergique d’une Ranavalona 1ère, et elle ne connaît rien de la politique ni ne veut s’adonner à un quelconque dessein patriotique de résistance.

D’ailleurs, elle n’a jamais eu de prise sur le pouvoir, et n’a pas non plus l’aura ni le charisme ou la dimension de ses aïeux.

La torpeur de la cour comme celle de la population grandissent à mesure que l’anarchie gagne le pays et que les Français font tout pour s’assurer l’engagement à leurs côtés de chefs et populations des régions côtières dont la cause première est de mettre à bas la domination merina.

Et comble d’outrance, la reine Ranavalona III apprend sans pouvoir réagir l’exécution par les armes le 15 octobre 1896 de son oncle, le prince Ratsimamanga, et de Rainandriamampandry, celui qui représente le pouvoir oligarchique tuteur de la monarchie, tous deux étant perçus par Gallieni comme étant l’âme même des troubles fomentés par les « Menalamba ».

Gallieni, le général « masika » voudrait-il alors ne laisser à la reine Ranavalona III, celle qu’il s’ingéniait pourtant à vouloir respecter il y a peu, que d’horribles oripeaux qu’il ne se serait pas conduit autrement à travers les terribles actes qui vont suivre :

. le samedi 27 février 1897 à 20 heures, dans le salon de sa demeure « Tsarahafatra » au Rova, la reine Ranavalona III apprend soudainement sa déchéance par la bouche de Rasanjy, nouveau ministre de l’Intérieur d’un gouvernement inféodé à la France, lequel est accompagné du commandant Gérard, envoyé de Galliéni ;

. le lendemain 28 février, à une heure du matin, la reine est contrainte de partir en exil à la Réunion, escortée de soldats, du sous-lieutenant Durand et de Razafindrazaka, l’un de ses douze gardes ;

. le même jour, Galliéni prend un arrêté abolissant la monarchie malagasy ;

. le lendemain, c’est au tour de la princesse Rasendranoro, sœur de la reine Ranavalona III, et de sa fille Razafinandriamanitra, de quitter Antananarivo sous la conduite de Ramanankirahina, officier du Palais, pour rejoindre la reine Ranavalona III dans son exil.

On peut aisément imaginer le désarroi d’une reine ainsi traitée, mais aussi celui de tout un peuple ainsi humilié.

L’isolement de la reine Ranavalona III, entièrement abandonnée à sa douleur, a quelque chose de pathétique quand on sait par ailleurs que c’est de chagrin qu’elle mourut à Alger le 23 mai 1917 à l’âge de 56 ans seulement.

Triste destin !

Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo

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Reproduction, même partielle, interdite des textes et illustrations
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* Le texte de cet article s’inspire largement des écrits de notre très regrettée mère, Suzanne Razafy-Andriamihaingo, auteure de l’ouvrage de référence « Colline sacrée des souverains de Madagascar, le Rova d’Antananarivo », L’Harmattan, 1989, d’où sont tirées également les photographies d’illustration, elles mêmes provenant de son fonds d’archives personnelles (tous droits réservés sur ces photos – reproduction interdite -).

*** NOTA:

Malgré les mentions expresses des droits réservés sur ces photos, certains « auteurs » et organisations auto-proclamés historiens ou spécialistes n’en ont cure et reproduisent sans s’embarrasser du respect de nos droits lesdites photos. En l’absence de correction de leur part, leur comportement étant moralement et juridiquement qualifiable, justice sera faite à leur encontre en son temps.

LA GALERIE DE LABODIPLO – VII – MERVEILLES DE LA PEINTURE CLASSIQUE CHINOISE

peinture chinoise 6

                                                 LA GALERIE DE LABODIPLO – VII –

                              MERVEILLES DE LA PEINTURE CLASSIQUE CHINOISE

En ces temps de violences de toutes natures, accordons-nous du temps pour l’émerveillement et la méditation.

Laissons-nous être subjugués par la très brillante et féconde civilisation chinoise, en particulier à travers les merveilles de son traditionnel art pictural dont les enseignements traversent les époques !

Les plus célèbres artistes d’Occident l’ont non seulement célébré, mais s’en sont inspirés à travers les âges et les écoles d’art.

Pour ma part extrêmement modeste, mais étant voué en admiration devant tant de richesse, de pénétration, de finesse, d’expression et de maîtrise, j’ai osé exprimé par ma modeste peinture le profond hommage que j’ai tenu à rendre à ces artistes chinois dont les œuvres font incontestablement partie de l’héritage de l’humanité.

Parmi eux, voici Huang Gongwang (1269-1354), le chef d’un style inimitable représenté par un monument pictural : les paysages de la dynastie des Yuan, tout spécialement des monts Fuchun, avec leurs montagnes, eaux, forêts et sentiers.

Ses œuvres, réalisées durant trois à quatre années au soir de sa vie, étant reclus dans un monastère, sont considérées comme le modèle même de la peinture paysagère de la tradition chinoise, exécutée au pinceau et encre sur papier précieux.

Le noir se décline ici dans toutes ses nuances, dans toutes ses colories et expressions…pour une expressivité si poétique !

On estime que Huang Gongwang avait exécuté des centaines de kilomètres de ces paysages, dont nous voyons ci-après…huit exemples dans ce parcours plus qu’exemplaire, enchanteur et admirable :

peinture chinoise 6

peinture chinoise 5

peinture chinoise 4

peinture chinoise 3

peinture chinoise 2

peinture chinoise

peinture chinoise 7

peinture chinoise 8

Pour notre part, la forme d’hommage que nous rendons à ces merveilles de peintures chinoises traditionnelles se traduit, entre autre, par ces trois représentations © suivantes – acryliques sur papier doré – : « Fleurs des champs »-.

fleurs épanouies

fleurs épanouies 2

fleurs épanouies 3

Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo

 

Article soutenu par : « FOCUS CHINE – YING & JP ASSOCIES »

 

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Reproduction, même partielle, interdite des textes et illustrations
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