DYNASTIES ROYALES ET PRINCIERES DE MADAGASCAR
Couronne de la Reine Ranavalona III, surmontée de l’aigle royal (Voromahery) et des sept pointes de sagaies (symbolisant les sept maisons royales et princières à l’origine de la royauté), autrefois exposée au Musée du Rova d’Antananarivo avant son incendie de novembre 1995. Photographie tirée de l’ouvrage « Colline sacrée des souverains de Madagascar, le Rova d’Antananarivo » de Suzanne Razafy-Andriamihaingo, L’Harmattan, 1989. Archives personnelles – Reproduction interdite – Voir Nota à la fin de cet article –
Les dynasties royales et princières de Madagascar.
Voilà un sujet qui taraude bien des Malagasy.
Et, non sans raison.
Car, un réel flou l’entoure ; or, en ces temps de recherches identitaires partout où l’on se trouve et se tourne, qui dans le secret de ses interrogations intimes ou dans des débats souvent sans fin, ne désire pas connaître avec exactitude ses racines ou ses références historiques personnelles ?
Mais bien plus que cela, les preuves que l’Histoire récente de Madagascar a la malice de nous offrir avec son cortège de décadences répétées qui privent de multiples générations d’espérance depuis la fin des années soixante nous convainquent définitivement qu’il est temps que ce pays et son peuple renouent résolument avec ses racines monarchiques.
Mais, les vraies.
Celles, authentiques et originelles, qu’il importe de rappeler et de retenir pour ne plus se fourvoyer dans de vaines considérations.
Les voici:
En peu de mots mais généalogie à l’appui, les réponses souhaitées et souhaitables sont là, au moyen de l’examen du document que nous avions établi en l’an 2000, symboliquement aux portes du XXIème siècle, pour bien marquer qu’à partir du XIIIème siècle, où tout a commencé, les lignées se succèdent du haut des neuf siècles considérés dans un déroulé visible et dialectique.
Chacune et chacun s’y retrouveront (y compris pour notre part…) en y voyant clair, espérons-nous ; et nos amis étrangers comme le plus grand nombre y trouveront quelques références pour mieux situer les différentes étapes historiques de Madagascar (à cet égard : voir sur ce même blog, la série d’articles intitulée « Réformateurs et modernisateurs de Madagascar », de la 1ère à la 10ème parties – cliquer sur « archives d’octobre 2013 » – ).
– * –
ARBRE GENEALOGIQUE DE REFERENCE
Ci-dessus : légende de l’arbre généalogique précédent. (Reproduction interdite © jpra)
SYNTHETISONS :
Cette synthèse est indispensable, ce en dépit de la relative complexité des règles de la succession au trône à Madagascar (sur le sujet, voir notre article « La succession au trône de Madagascar » sur ce même blog, daté du 4 octobre 2015).
Tout donc a commencé à la fin du XIIIème siècle avec Andrianamboniravina (petit-fils du roi mythique Andrianerinerina).
Il fut la première source dynastique royale qui, après les rois légendaires et mythiques des origines, donna naissance aux deux branches issues de ses deux fils :
. Andriampandrana, d’où se forme une lignée aboutissant aux reines Rafohy et Rangita (en bleu foncé sur l’arbre généalogique) ;
. Andriandranorana, d’où se forme une lignée aboutissant au roi Andriamamilazabe et au prince Andriandranando (en vert foncé sur l’arbre généalogique).
A partir du XVème siècle, une alliance matrimoniale de ces deux branches dynastiques va, par la suite, donner à l’Imerina, la région centrale qui va être au cœur de la formation du futur royaume de Madagascar, ses souverains bâtisseurs, ceux qui vont forger dans la durée et le marbre ce royaume en devenir.
Cette épopée durera jusqu’au roi Andriantsimitoviaminandriana au XVIIIème siècle.
Ensuite, une autre branche dynastique collatérale va naître.
Elle est issue du prince Andrianambonimerina et de la princesse Rangorinimerina, cette dernière étant la tante du roi Andriantsimitoviaminandriana (en rouge sur l’arbre généalogique).
Car, avant de mourir ce roi avait choisi, de préférence à son propre fils, le fils de cette princesse pour lui succéder.
Or, le prince Rafondrazaka, fils de Andriantsimitoviaminandriana, était en position légitime pour hériter du trône (en bleu-vert-orange sur l’arbre généalogique).
Puis, les étapes suivantes voient se succéder, de sous branche en sous branche, des souverains aux noms plus familiers, ce jusqu’à la reine Ranavalona III, à la fin du XIXème siècle.
En sont ainsi issus les rois et reines allant de Andriambelomasina à Ranavalona III en passant par Andrianampoinimerina, Radama 1er, Ranavalona 1ère et autres.
Pour leur part, – et cette donnée fondamentale mais peu connue, ou volontairement tue, est à relever – la dynastie Andriamamilazabe et, surtout, celle issue de Andriandranando, vont former ou renforcer les branches royales et princières des pays tels que le Sakalava du Menabe et du Boina (en vert-violet et bleu-vert sur l’arbre généalogique) , et le pays Betsileo du nord (en vert-bleu clair sur l’arbre généalogique).
Ce qui fait de la dynastie Andriandranando un fort élément fédérateur des traditions royales et princières malagasy sur une large partie du territoire de Madagascar.
Mais, de façon plus large, et pour reprendre une assignation historique du Roi Ralambo (1575-1610) à ses successeurs (que le rappelle le « Tantaran’Ny Andriana » – La geste des souverains de Madagascar – ), de vérité historique les souverains de Madagascar doivent s’abreuver à la source des Trois Frères Nobles que sont les Andrianteloray*, c’est à dire les Andriantompokoindrindra, les Andrianamboninolona et les Andriandranando, tout spécialement en y prenant épouses, car disait le roi Ralambo, il convient d’assurer, de façon certaine et authentique, la continuité dynastique à travers et grâce aux femmes.
C’est donc à la lumière de ce qui précède qu’il convient, non seulement d’appréhender mais, surtout, de rechercher les éléments référentiels à une bonne approche de la question dynastique royale à Madagascar.
Ce, pour le présent et pour l’avenir de ce pays dont le peuple est en train de perdre dangereusement son âme, notamment parce qu’il a une fâcheuse tendance à oublier, ou tout simplement, à ignorer les racines et les sources premières de son passé pour ne se référer, par facilité et de façon erronée, qu’aux apparences du moment.
Car, nul doute que la monarchie malgache qui un jour, à n’en pas douter, devra renaître de ses cendres pour offrir à Madagascar un nouveau destin, aura à rechercher ses fondements à ces sources et racines premières – le tronc de l’arbre – , et non à en retrouver vainement ses traces parmi les entremêlements des branches les plus récentes, lesquelles s’étaient, à partir du début du XIXème siècle, diluées dans les méandres des manoeuvres politiques de captation du pouvoir de l’époque, initiées et entretenues par les clans roturiers omnipotents.
Il est donc tout aussi erroné que faussé de rechercher dans l’entremêlement si complexe de ces branches les plus récentes les sources référentielles indispensables à un besoin d’authenticité pour re-fonder la monarchie à Madagascar.
Or également, à force d’entremêlements récents de ces branches dynastiques récentes, et à force de manoeuvres politiques à l’origine de leur naissance et qui ne firent qu’alimenter les méandres, l’on s’y perd pour reconnaître parmi les descendants actuels des souverains les plus récents qui détient réellement quelque légitimité pour reprendre le flambeau royal.
De sorte qu’un retour aux sources premières décrites plus haut est plus qu’indispensable, et au demeurant historiquement fondé, afin de retrouver avec certitude les sources-mêmes de cette légitimité.
Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo
Nota : cliquez sur l’arbre généalogie à l’endroit souhaité pour agrandissement à l’aide du curseur.
* Bientôt sur ce blog j’écrirai sur l’histoire des Andrianteloray, à laquelle mon arrière-grand-père, Pierre Razafimbelo, avait consacré un ouvrage qui fait référence.
Reproduction, même partielle, interdite des textes et illustrations
Nota : je regrette vivement que, malgré la mention ci-dessus, sur Facebook certains – et plus grave encore, auxquels s’ajoute un « spécialiste » en matière d’Art dans un article sur les rocambolesques rebondissements autour de la « restitution » de la couronne de la reine Ranavalona III – aient reproduit la photographie de la couronne royale produite en tête du présent article, ce sans prendre la peine d’en mentionner l’origine (de fait, cette photographie avait été prise en 1958 par ma soeur Laurence Razafy-Andriamihaingo et fait, de façon exclusive, partie des archives de notre famille). Une telle pratique de captation dénote chez les fauteurs un état d’esprit déplorable et répréhensible…