SIMONE VEIL, L’ICÔNE HUMANISTE FRANCAISE DU TEMPS PRESENT

 

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« Profusion d’hommages » (JPRA) – Reproduction interdite –


 

                 SIMONE VEIL, L’ICÔNE HUMANISTE FRANCAISE DU TEMPS PRESENT

Simone Veil fut, entre autres très hautes qualités, la Présidente d’honneur de La Renaissance Française, une institution reconnue d’utilité publique créée en 1915 par le Président de la République française, Raymond Poincaré, pour conjurer le mal et pour imposer et promouvoir la Paix.

Il y a trois ans en cette année 2020, le 30 juin 2017, par un communiqué publié ci-dessous la Délégation de Madagascar de la Renaissance Française, présidée par M. Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo, lui rendit un hommage ému :

                                                     LA RENAISSANCE FRANCAISE

                                                  Culture – Solidarité – Francophonie

 

                    Établissement d’utilité publique fondé en 1915 par Raymond Poincaré,     

                                                   Président de la République française

                      placé sous le haut patronage des Ministres des Affaires Étrangères,

                                 de l’Intérieur, de la Défense et de l’Éducation nationale

               Présidente d’honneur : Madame Simone Veil, de l’Académie française

                                     Président international : Professeur Denis Fadda

 

                                            DELEGATION DE MADAGASCAR

 

                    Président : Monsieur Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo

 

                                                                 COMMUNIQUE

 

La Renaissance Française et l’ensemble de ses membres sont orphelins.

 

Simone Veil, notre Présidente d’honneur, l’icône humaniste française du temps présent n’est plus. Elle s’est éteinte en sa 89ème année à Paris au milieu des siens.

 

Notre très vive émotion rejoint celle de notre Président international et du Conseil d’administration, auxquelles s’ajoute l’émotion unanime des présidents des délégations établies en France et à l’Etranger, de même que celle de l’ensemble des membres de La Renaissance Française, au nombre desquels figurent ceux de la Délégation de Madagascar.

 

Simone Veil, de par sa haute et attachante personnalité autant que de par la profondeur de ses sentiments, vues et combats, portait très haut et loin les idéaux sur le fondement desquels La Renaissance Française inscrit elle-même ses propres actions en faveur de la Paix, de la Démocratie et des valeurs partagées en Francophonie, ce dans l’optimisation du dialogue des cultures.

 

A l’occasion du Centenaire de La Renaissance Française en 2015, une Rose Simone Veil fut créée et plantée dans les jardins du Luxembourg au pied du Palais du Luxembourg à Paris, siège du Sénat français, en hommage particulier à la grande Dame qui, en tant que Ministre de la Santé, fit évoluer de façon quasi-révolutionnaire les droits de la Femme à travers la Loi Veil sur l’avortement adoptée fin 1974 avec ses répercussions heureuses pour la condition féminine, mais aussi en souvenir des terribles épreuves de la déportation, de laquelle elle a triomphé de maints crimes contre l’humanité.

 

Son exemple, elle la magistrate de condition, l’Académicienne qui fut aussi la première Présidente du Parlement européen, et désormais sa haute mémoire forgée dans une haute conscience nourrie de ses expériences de vie et de responsabilités publiques, doivent servir d’exemples pour le renforcement de la culture de Paix, de dialogue des cultures et des valeurs de l’humanité, tout particulièrement à l’adresse de la jeunesse de tous pays, y compris celle de Madagascar.

 

La Délégation de Madagascar de La Renaissance Française, présidée par Monsieur Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo, qui est par ailleurs membre du Conseil d’administration de La Renaissance Française, s’associe aux condoléances très attristées exprimées depuis Paris par le Président international de La Renaissance Française, le Professeur Denis Fadda, ce en son nom personnel et en celui du Conseil d’administration, adressant en particulier aux enfants et à toute la famille Veil toute la compassion de ses membres devant leur douleur.

 

La Délégation de Madagascar, dont le Président Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo fut aussi Vice-Président du Comité d’organisation du Centenaire de La Renaissance Française à l’occasion duquel en 2015 fut créé « La Rose Simone Veil » à l’initiative de la Délégation du Luxembourg, continuera, au sein de cette noble institution, de s’activer pour la valorisation de la culture malgache et pour la solidarité entre les peuples partageant des valeurs porteuses d’avenir pour tous.

 

A l’heure où les rapports franco-malgaches connaissent un regain d’attentions et d’intentions réciproques à la suite de la visite officielle à Paris du Président de la République de Madagascar, Monsieur Hery Rajaonarimampianana, à son homologue français nouvellement élu Président de la République française, Monsieur Emmanuel Macron, le 28 juin 2017, la Délégation de Madagascar de La Renaissance Française entend jouer le rôle qui lui revient, notamment dans le domaine culturel, artistique, de la jeunesse et des échanges économiques.

 

Ce rôle spécifique est d’autant plus souhaité qu’au sein également de l’espace francophone la Délégation de Madagascar de La Renaissance Française, forte de l’expérience acquise par son Président du fait de son implication passée dans les actions de l’Organisation Internationale de la Francophonie, aujourd’hui présidée par Madagascar à la suite du Sommet de novembre 2016, a vocation à s’y activer, notamment pour donner des contenus concrets aux orientations définies collectivement.

 

C’est dire que dans leur mise en œuvre la présence permanente, à Madagascar même, à Antananarivo, du Vice-Président de Délégation de Madagascar de La Renaissance Française, Monsieur Fetison Rakoto-Andrianirina, dont le parcours politique, culturel et économique est bien connu, constitue à ces égards un atout indéniable

 

                                                                                                                Le 30 juin 2017

Pièce jointe : lire le texte original du communiqué (cliquer sur le lien).

Communiqué Simone veil

Voir également par ailleurs, sur ce même blog, l’article daté du 11 juin 2014 intitulé « La Renaissance Française ».

 


 

VISITE OFFICIELLE EN FRANCE DE SA MAJESTE LE ROI RADAMA III – 2ème partie –

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Lamba en soie sauvage du Roi Radama III, portant la symbolique des trois fleurs « Voninahitra » allégoriques du troisième Radama – JPRA – Reproduction interdite –


                              VISITE OFFICIELLE DU ROI RADAMA III EN FRANCE

                                                                –  2ème partie   –

                                      CONCORDE ET EMBELLIE RELATIONNELLES

Cette visite prend incontestablement du relief.

La République française avait décidé de déployer tous ses fastes pour une visite exceptionnelle.

Pensez donc :

c’est le souverain de Madagascar, la Grande Île régénérée et refondée sur un socle rayonnant, composé du « Fahamarinana » (authenticité, vérité) et du « Fahamasinana » (sacralité, légitimité) qui, de son Olympe vient rendre hommage, par sa visite, à la République française dont le président, solidement installé en plein milieu de son mandat présidentiel redéployé sur sept ans comme à l’origine, volontiers inspiré par le modèle gaullien, lui a redonné sa grandeur et son éclat.

Dès le lendemain de l’arrivée de Radama III sur le sol français le 26 avril 2025 au milieu de l’après-midi, et dont nous relations les moments forts (voir sur ce même site la 1ère partie de notre article « Visite officielle en France de Sa Majesté le Roi Radama III » datée du 4 juin 2017), les choses sérieuses commencent en ce lundi 27 avril.

Cela se traduit par un programme qui va crescendo et d’une intensité telle qu’il donne le tournis. Chaque minute, en effet, compte et il n’est pas question de déborder d’un iota du timing prévu au risque de chambouler l’économie même du programme dans son ensemble…La cadence est donc vive, chaque moment est cadré au millimètre près, aucune improvisation ni approximation ne sont permises !

L’ambassadeur Raholimanomanana-Andriamimanja a fait là  – et continue de faire ! – un excellent travail en amont et en aval, car c’est lui qui, comme un architecte doublé d’un chef d’orchestre et d’un général en campagne, a tout conçu, prévu, planifié, mis en perspective, et mis en musique, ce de concert étroit avec la cellule africaine de l’ambassadeur de Bénourmanne au palais de l’Elysée, et bien entendu en exécution des instructions générales venues du Roi Radama III et de son ministre des Affaires étrangères. Dans la boucle d’organisation de cette visite la part prise par l’ambassadeur de France à Madagascar s’est, par voie de conséquence, plus concentrée sur la liaison locale à Antananarivo même, sans toutefois en minimiser l’importance.

PREMIERES ETAPES FRUCTUEUSES

A son réveil, le Roi Radama III se remémore encore son rêve de la nuit. Il y voyait le Rova, le Palais « Manjakamiadana » revivre et s’animer, enveloppé d’un lamba mena !

Oui, en fait au lendemain même de son intronisation le 22 novembre 2024, il avait pris une ordonnance, confirmée par la suite par le Conseil des Pairs et par l’Assemblée nationale, de reconstruire l’intérieur du palais royal à l’identique de ce qu’il fut à l’origine, c’est à dire en bois précieux. Les travaux vont bon train, et là son rêve n’était finalement qu’une anticipation sur une réalité prévue pour la fin de cette année 2025 ou début de l’année prochaine en 2026 !…

Rova renaissant

« Rova renaissant » (JPRA) – Reproduction interdite –


Il est 9h du matin, la température affiche déjà les 20° à l’ombre et la Météo annonce 30° pour l’après-midi. L’adage populaire « en avril ne te découvres pas d’un fil » est largement démenti ! L’effervescence est palpable au sein de la délégation malgache. Le Roi Radama III fait un rapide point du programme de la journée dans le salon de sa suite avec son ministre des Affaires étrangères, le général Ranjahafalina, et son ambassadeur, Raholimanomanana-Andriamimanja.

Dans le même temps, dans le couloir des appartements réservés au Roi dans l’Hôtel de Crillon, Monsieur Rabenarimanohy, chef du protocole du roi, se fait accompagner du colonel Randria, aide de camp, pour mette la dernière main, avec l’officier de liaison du SPHP (Service de Protection des Hautes Personnalités), au déroulé du programme du matin qui doit débuter dans moins d’une demie heure, à  9h30.

A l’heure dite, voici que le chef du protocole du roi annonce Monsieur André Portecariel, le ministre français délégué à la Coopération et à la Francophonie.  Celui-ci s’incline respectueusement devant le roi, lequel s’avance d’un pas vers son hôte en lui tendant chaleureusement la main. Durant les trois quart d’heure d’entretien où le roi s’entoure des omniprésents ministre des Affaires étrangères et ambassadeur en France, sont également présents dans le salon de la suite royale les ministres de l’Economie et des finances, ainsi que de l’Education et de l’Enseignement supérieur, car sont évoqués tour à tour les questions de la relance mutuellement souhaitée de la commission mixte franco-malgache, du re-échelonnement de la dette malgache, l’annulation de certaines autres, ainsi que le renforcement des matières de coopération pour l’appui à l’Enseignement supérieur à Madagascar.

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« Claire vision » , maquette de paravent vitrail – JPRA – Reproduction interdite –


Bien d’autres matières et sujets seront à discuter et à faire avancer avec d’autres ministres et hauts responsables français dans les heures et jours suivants, tout spécialement la question lancinante des Iles Eparses – les « Nosy malagasy » pour les Malgaches – , le grand projet de création d’une technopôle à Antsiranana, et la candidature d’un Malgache à la fonction de Secrétaire général de l’Organisation Internationale de la Francophonie.

Mais, vu l’importance stratégique de ces trois sujets, le premier non encore résolu bien que les négociations soient bien avancées, le second en phase de finalisation, et le troisième nécessitant une étroite concertation bilatérale et multilatérale, ils ne seront évoqués qu’avec le président Maiteron lui-même le 30 avril au Palais de l’Elysée.

Aussitôt Monsieur Portecariel a-t-il pris congé de Radama III que ce dernier doit maintenant prendre place dans sa berline officielle, une magnifique et imposante Citroën « DS7 » du dernier modèle, cette fois-ci avec la reine Rasoa. Direction : le Jardin Tropical du Bois de Vincennes où le roi est attendu pour une cérémonie au Monument aux Morts Malgaches des deux guerres mondiales à 10h30.

Pour un départ à 10h15 de l’Hôtel de Crillon, le trajet ouvert et dégagé par les motards de la Préfecture de Police de Paris et les éléments avancés du SPHP se fait en un temps record !

Sur place, c’est le Ministre français des Anciens Combattants, Monsieur Hamsalem Bouchekara, qui accueille le roi, la reine, et leur délégation. Un petit détachement de la Garde Républicaine et, surtout, les porte-drapeaux des différentes formations militaires auxquelles avaient appartenus les anciens combattants malgaches sont alignés de part et d’autre du « Vatolahy » monumental.

Sa Majesté le Roi Radama III est pénétré par la solennité de l’instant. Par l’émotion également !, devant ce « Vatolahy » monumental rappelant la tradition malgache et ici confectionné pour en faire ressortir le caractère mémoriel en cette terre étrangère. Son  émotion est d’autant plus grande que, durant la seconde guerre mondiale, certains de ses lointains aïeux s’étaient portés volontaires pour s’engager dans les mémorables batailles ayant conduit à la victoire finale sur l’horreur nazie. Il se souvient !

Et avec lui la reine Rasoa, des représentants de la communauté malgache de France et les membres de l’Ambassade Royale de Madagascar en France, tous venus et rassemblés ici en ces lieux de mémoire pour une communion de pensée. Le roi dépose maintenant au pied du « Vatolahy » une belle gerbe aux couleurs du drapeau malgache frappé de l’aigle royal, le « Voromahery ». Vient alors la sonnerie aux morts. Lui et l’assistance s’immobilisent le temps du recueillement.

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Vatolahy au Jardin Tropical du Bois de Vincennes – Reproduction interdite –


Fin de la cérémonie. Le roi serre les mains de la vingtaine des représentants de la communauté malgache, tous ravis de ce moment privilégié. Retour à l’Hôtel de Crillon, où l’attend un autre ministre français à 11h15. En l’occurrence, c’est une ministre, Madame Geneviève Gineste, en charge des territoires ultramarins, pour entretenir le souverain malgache, toujours dans le salon de la suite royale, des rapports de voisinage en Océan indien occidental, la France y étant bien présente avec La Réunion et Mayotte dont le statut territorial fait débat, mais elle vient également pour évoquer la concertation nécessaire entre la France et Madagascar au sein de la Commission de l’Océan Indien  (la COI), dont par ailleurs les deux parties se félicitent, en particulier sur la question de la reprise des liaisons inter-îles et de la vigie maritime dans cette zone océane où se livre la pêche clandestine.

Une heure après, à 12h15, c’est le directeur général de l’Agence Française de Développement (l’AFD), Monsieur Michel Saugageot, qui se trouve maintenant installé dans le canapé, face au roi, pour l’entretenir essentiellement de l’engagement résolu de l’AFD pour la pleine réalisation des objectifs que contient le nouveau Plan de Développement Intégré, Rapide et Durable de Madagascar (PDIRDM), un acronyme trop compliqué pour lui préférer l’autre appellation de ce plan qui parle mieux à l’esprit, et par conséquent plus mobilisateur : « Madagasikara Mijoro Androany» (« Madagascar debout aujourd’hui ») – « MMA » -.

Dans cet important engagement la France, par l’AFD, s’associe bien volontiers :

. à la Banque Mondiale ; au PNUD ; à l’American Africa Challenge (AAC), un nouveau concept américain de coopération avec l’Afrique initié récemment par le nouveau Président des Etats-Unis, Joe Biden, qui avait succédé dès fin 2020 à un Donald Trump battu lors des élections présidentielles ;

. à la JICA Japonais (Japan International Cooperation Agency) qui agit elle-même à l’intérieur du TICAD X (plate forme de coopération multilatérale où la triangulaire Japon-France-Afrique prend le pas) ;

. à ce qui est communément appelé « Le plan Marshall allemand », traduisant la nouvelle politique de la première puissance économique européenne qui entend faire entendre sa propre voie en Afrique ;

. à l’Union Européenne dans le cadre de la nouvelle FED (Fonds Européen de développement) telle qu’elle avait été renégociée avec l’Union Africaine en 2020 ;

. et au Forum Chine-Afrique qui compte en son sein une structure dédiée à une coopération trilatérale Chine-France-Afrique.

A travers ces coopérations préférentielles, s’agissant de Madagascar, on voit bien les orientations stratégiques qui sont celles de la France, qui ne tient plus à apparaître comme agissant en solo.

L’entretien a duré plus d’une heure et ce n’est qu’à 13h30 que Monsieur Saugageot peut prendre congé du souverain malgache, tant ce dernier se passionnait pour les précieuses indications que le directeur général de l’AFD lui avait exposées.

LA MEMORABLE RENCONTRE AVEC LA COMMUNAUTE MALGACHE – ANNONCE DE REFORMES CAPITALES

Mais la matinée de ce 27 avril 2025 n’est pas pour autant terminée.

Radama III tient absolument à rencontrer à la Résidence de l’ambassadeur de Madagascar l’ensemble de la communauté malgache, tout au moins celles et ceux parmi elle qui avaient auparavant reçu le fameux carton d’invitation à cet effet. Car, cette communauté composite compte désormais environ deux cents mille personnes réparties à travers la France, et le souverain malgache est impatient d’avoir le contact physique avec elle.

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Allégorie du « Fahamarinana » (vérité, authenticité, transparence), vitrail du Palais de Justice d’Anosy, conception de l’architecte-urbaniste Pierre Razafy-Andriamihaingo. 1963. Reproduction interdite –


Au départ de l’Hôtel de Crillon à 13h45, le cortège précédé par les « motards acrobates », ainsi que le roi les qualifie gentiment dans un esprit admiratif, s’ébranle dans un rituel très bien huilé à la vitesse d’un éclair pour parvenir à 14h10 au 1, boulevard Suchet au seuil duquel l’ambassadeur et son épouse, qui avaient pour leur part quitté l’Hôtel de Crillon dès 13h tout à l’heure, sont maintenant en position pour accueillir le roi et la reine, lesquels sont suivis de toute leur délégation.

En dedans de la Résidence comme au dehors dans le jardin, plus de trois cents personnes sont amassées pour rencontrer et écouter le couple royal et, si possible, lui serrer la main.

Le roi et la reine sont là et sont placés debout, seuls sur l’estrade qui tient lieu de tribune à la Résidence ! Les applaudissements crépitent avec ardeur et chaleur pour ce moment unique dans les annales. Puis, le chef du protocole annonce de sa voix de roc l’hymne national « Ny Tanindrazan’nay Malala ô ». Après quoi, intervient un court discours de bienvenu de l’ambassadeur dont la voix se noue d’émotion.

Et voici maintenant l’autre moment tant attendu où Sa Majesté le Roi Radama III s’adresse à ses compatriotes – il tient à ce qualificatif de préférence à « ses sujets » – sur un ton non point paternel ni solennel mais avec cette simplicité qu’on lui connaît. Il est pourtant le dépositaire d’une tradition monarchique malgache pluriséculaire, il est vrai, adaptée depuis son avènement et son intronisation aux présents temps modernes de l’innovation, y compris sur le plan institutionnel.

Il dit d’ailleurs ne pas faire sien l’adage populaire et ancien qui dit : « Tsy maintsy miforona amin’ny mpanzaka dahôlo ny nendrohan’ny zavatra rehetre » (« l’origine de toutes choses ne peut venir que du roi »), préférant la mobilisation générale et solidaire pour aller de l’avant dans la concorde nationale, en lançant cette formule : « Tsy maintsy mifampitondra isiky rehetre ! ».

Puis, un moment fort intervient quand le roi annonce deux réformes majeures :

1. une modification très prochaine de la loi électorale avec la création de la fonction de Conseiller des Malgaches de l’Etranger (« Mpanoro-hevitran’ ny Malagasy any Andafy ») qui siègera au sein du Conseil des Pairs. Ce Conseiller unique aura à représenter ces Malgaches de la diaspora résidant en Europe, aux Amériques et en Asie et à défendre leurs intérêts au sein du Parlement;

2. la création et la mise en service le mois de juin 2025, avant la Fête de l’Indépendance, d’un Fonds Malagasy d’Investissement (FoMaI) dont le siège sera basé à Paris, une structure mutualiste constituée d’un fonds de base alimenté par quatre banques, deux françaises et deux malgaches, auquel s’ajoute une structure adossée constituée d’un fonds variable alimenté par les apports volontaires de personnes physiques (malgaches ou étrangers), lesquelles sont regroupées dans un Club d’Investisseurs pour le FoMaI. L’objectif principal est d’appuyer financièrement des projets d’investissements directs à Madagascar et des Start Up créées par des Malgaches de l’etranger.

L’enthousiasme général se lit sur tous les visages, en particulier quand le Roi termine son intervention en martelant : « Madagasikara Mijoro Androany e ! ». La salle est comme secouée sous un tonnerre d’applaudissements, chacun se convainquant qu’avec ce roi Madagascar et les Malgaches se sont trouvés le guide tant attendu.

Puis, le roi suivi de la reine Rasoa, lesquels sont précédés de l’ambassadeur et de son chef du protocole qui leur ouvrent le chemin, traversent la masse compacte de la foule rassemblée autour d’eux pour serrer la main à qui saura la leur tendre opportunément. Les souverains malgaches s’attardent quelque peu pour bavarder avec celles et ceux qui ont pu se frayer un chemin jusqu’à eux. Ils se dirigent maintenant vers le buffet dressé à leur intention, dehors dans le jardin de la Résidence, pour un rapide déjeuner sous un chapiteau, autre moment qui permet à d’autres convives de les approcher timidement, le roi et la reine se prêtant bien volontiers à cette détente partagée autour de mets malgaches succulents préparés par le chef cuisinier de la Résidence.

En fond sonore, un groupe folklorique malgache de France, le « Mozika Gasy Eto Frantsa », agrémente de son riche répertoire musical les conversations qui vont bon train…

A 15h15 Radama III et la reine Rasoa sont conduits par l’ambassadeur au 1er étage de la Résidence, partie privative où ils peuvent se reposer quelque peu durant une bonne demie heure avant de repartir à 15h50.

LE MARATHON SE POURSUIT JUSQU’A TARD DANS LA SOIREE

Le couple royal se sépare dans deux directions : pour le roi, le Conseil Régional d’Ile-de-France, rue de Babylone dans le 7ème arrondissement de Paris,  où l’attendent, à 16h, la présidente de cette importante collectivité locale, Madame Valérie Pinocra, dans les salons de l’Hôtel de Région, et à 16h35 l’ensemble des conseillers régionaux dans l’hémicycle du Conseil Régional ; pour la reine, est inscrit à son propre programme un retour à l’Hôtel de Crillon où est prévu un entretien avec l’épouse du ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie, Madame Portecariel.

Depuis une bonne trentaine d’années le Conseil Régional d’Ile-de-France entretient avec la Communauté Urbaine d’Antananarivo (CUA) une coopération dont les deux parties se félicitent, et maintenant il s’agit de la renforcer et de réfléchir au thème proposé : « Coopération décentralisée à Madagascar : enjeux et priorités ».

Dans l’hémicycle, au-delà des réflexions autour de ce thème, et auxquelles le Roi Radama III, son ministre des Affaires étrangères et son ambassadeur avaient donné des réponses et indications qui toutes semblaient satisfaire l’ensemble des conseillers, toutes tendances politiques confondues, c’est en réalité la curiosité – toute légitime – qui les poussa à venir en nombre dans les travées.

Chaque conseillère, chaque conseiller, voulaient voir de quoi est construit ce souverain malgache dont l’aura s’impose si vite. Ils n’ont visiblement pas été déçus, bien au contraire le charisme du roi a joué ! D’où les applaudissements nourris et spontanés à la fin de cette rencontre, d’une durée de plus de deux heures, et dont chacun se souviendra d’autant mieux que le cocktail offert par la présidente Pinocra à 18h45 dans les salons de l’Hôtel de Région avait permis des échanges encore plus conviviaux.

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« Madagascar », La Grande Ile, ici naturellement taillée dans une pierre semi-précieuse – Reproduction interdite –


De son côté, après son entretien d’une demie heure avec Madame Portecariel, l’épouse du ministre délégué à la Coopération et à la Francophonie, la reine Rasoa doit maintenant se rendre avec elle à l’Hôpital Necket-Enfants Malades rue de Sèvres dans le 7ème arrondissement de Paris. Madame Raholinomanana-Andriamimanja, l’épouse de l’ambassadeur en France, accompagne la reine. Il est 16h45. La reine et sa délégation visitent l’ « Espace Espoir » qui est une réalisation de la Fondation Espoir-Enfants créée par Madame Carole Maiteron. On connaît l’engagement très fort de la reine en faveur des enfants défavorisés à Madagascar, et cette visite l’inspire beaucoup quant aux dispositions qu’elle compte prendre une fois rentrée à Madagascar.

Cette visite est une sorte d’initiation pour la reine Rasoa, dont précisément elle tirera quelque arguments pour sa visite, dans l’heure qui suit à 18h, à Madame Carole Maiteron au Palais de l’Elysée où, la reine y ayant été reçue chaleureusement sur le perron de l’Elysée, les deux premières dames bavardent maintenant agréablement dans le Salon des Ambassadeurs tout en buvant un thé noir de Chine, breuvage favori de la reine malgache. Après, à 19h30 voici que la reine Rasoa est de retour à l’Hôtel de Crillon où elle attend son époux.

Journée harassante que ce 27 avril ! Et cette chaleur qui ne diminue pas le soir venu, devenue étouffante avec l’amoncellement de nuages au-dessus de Paris… !

Un retour du roi sur l’Hôtel de Crillon à 19h45 permet juste une petite pause dans les appartements privés du couple royal. Car pour sa part à 20h30 le roi doit encore recevoir Monsieur Edmond Mérignac, le ministre français de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. Personnage ô combien important dans les circonstances actuelles d’un appui exceptionnel que la France entend apporter aux efforts de redressement de l’économie, des finances et du secteur industriel malgaches. Rappelons à cet égard que pas moins de cinq accords sont proposés par la France  à la signature malgache : un Protocole d’accord de re-échelonnement de la dette malgache ; un Accord d’annulation partielle de dettes ; un Accord d’appui budgétaire ; un Accord d’appui à la création d’une technopôle à Antsiranana ; et un Accord de promotion réciproque des investissements.

On se souvient que dans un suspense insoutenable pour l’ambassadeur Raholimanomanana-Andriamimanja, le roi lui avait finalement annoncé, seulement la veille de sa venue en France hier 26 avril, que seule la signature de l’Accord de promotion réciproque des investissements serait ajournée, ce pour des raisons obscures en rapport avec les non moins ténébreuses motivations irrationnelles qui amenèrent certains ministres et caciques francophobes de l’entourage du roi à craindre ce qu’ils considèrent comme une trop forte emprise de la France sur Madagascar…

A l’issue de l’entretien de ce 27 avril au soir avec le ministre Mérignac, ceux-ci semblaient pourtant rassurés en le manifestant à demi-mot à leur roi, mais le doute demeure quant à la décision finale de Radama III d’autoriser ou pas la signature dudit accord en vue de la cérémonie prévue à l’Hôtel de Matignon lors de la rencontre avec le Premier ministre français, Monsieur Bernard La Vignemont, le 30 avril à 17h.

Voilà en tout cas une journée du 27 avril bien remplie !, sans anicroche ni imprévu.

Le Roi Radama III et la Reine Rasoa peuvent désormais, en compagnie des ministres et de l’ambassadeur qui se joignent à eux, dîner tranquillement et en toute simplicité, mais tard dans la soirée puisqu’il est déjà 22h, au restaurant de l’Hôtel de Crillon. Tout ce beau monde jouit de ce moment de détente, auquel le roi demande à la presse malgache présente de se joindre. C’est une aubaine pour l’ensemble des journalistes et photographes malgaches présents, car ils peuvent ainsi glaner, capter et saisir des instants et des sujets de choix et exclusifs pour leurs papiers destinés à être publiés et diffusés à Madagascar dès le lendemain.

D’ailleurs, ils ont du pain sur la planche, car demain 28 avril s’annonce aussi chaud, au propre comme au figuré, qu’aujourd’hui.

Le général Ranjahafalina, ministre des Affaires étrangères, est content ! Tout s’est excellemment passé. Le cœur léger donc, tard dans la soirée vers 23h30 après avoir pris congé du roi et de la reine, il se permet une petite escapade nocturne et rafraîchissante non loin de l’Hôtel de Crillon, sur la Place de la Madeleine dans un Café bien connu, pour y retrouver dans la joie partagée un de ses anciens camarades de Saint-Cyr et de l’Ecole de Guerre, le général de Corps d’Armée Le Guillemont, qui connaît d’ailleurs fort bien Madagascar.

Tandis que de son côté l’Ambassadeur Raholimanomanana-Andriamimanja rentre fourbu mais satisfait à sa Résidence, boulevard Suchet. Il est minuit, et demain matin il lui faut se réveiller à 7h pour préparer ce qu’il y a à préparer pour une journée du 28 avril tout aussi chargée que celle de ce 27 !

(A suivre : 3ème et avant-dernière partie)

Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo, ancien Ambassadeur de Madagascar en France (2002 à 2008), Avocat honoraire au Barreau de Paris.

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Reproduction, même partielle, interdite des textes et illustrations

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* NOTA : Il s’agit ici d’une fiction qui, cependant, s’inspire en grande partie de faits réels et vécus rapportés à un contexte imaginé mais plausible.

LA VISITE OFFICIELLE EN FRANCE DE SA MAJESTE LE ROI RADAMA III

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« Voninahitra » (JPRA) – Reproduction interdite –


                            VISITE OFFICIELLE DU ROI RADAMA III EN FRANCE

                                                              –  1ère partie   –

                      UNE DONNEE INSTITUTIONNELLE DOUBLEMENT FAVORABLE

Nous voici à la fin de l’année 2024.

Madagascar et les Malgaches se reprennent en main…! Résolument.

Dans un contexte international marqué par les vitaux défis résultant du réchauffement climatique auquel les compagnies aériennes et maritimes contribuent largement du fait d’avoir été exclues du champ d’application de l’Accord de Paris issu de la COP21 de décembre 2015, Madagascar venait de renouer en novembre 2024 avec son legs historique, de retrouver ses racines séculaires et d’inscrire son nouvel envol dans une modernité résolue.

La grave crise sanitaire de la Covid-19 qui débuta à la jointure des années 2019-2020, un moment si menaçante que la planète entière se demandait un temps comment l’Humanité allait s’en sortir, a finalement été maîtrisée grâce à une forte action concertée au niveau international bien qu’à Madagascar elle ait laissé un souvenir très douloureux à cause du mauvais traitement de cette crise pandémique dont s’étaient rendu responsables les hautes autorités nationales de l’époque.

De sorte que c’est encore et toujours la donne « réchauffement climatique », dont les effets dévastateurs sont attisés par la paupérisation galopante, qui demeurait le grand défi du moment et face auquel Madagascar et les Malgaches avaient décidé, dans un sursaut vital, de se ressaisir drastiquement dans un éveil salutaire d’une conscience commune.

MADAGASIKARA MIJORO ANDROANY !

Une monarchie constitutionnelle s’était en effet rapidement mise en place à la faveur d’un mouvement pacifique sans précédent, promptement qualifié par les médias d’ « Eté malgache » (le mois de novembre correspondant à l’été dans l’hémisphère sud), dont la jeunesse estudiantine, se rappelant les élans de leurs aînés lors du « Mai 1972 » qui avait à l’époque eu raison de l’ « Etat PSD », était bien inspirée de l’encadrer strictement afin que les partis politiques ne le récupèrent pas.

Le projet « Madagasikara Mijoro », dont nous exposions les lignes directrices sur ce même blog, venait de prendre forme, vie et consistance sous la forme de sa déclinaison actuelle: « Madagasikara Mijoro Androany » !

Le jeune et sémillant Roi malgache, nouvellement installé au bout d’un processus consensuel auquel toutes les forces vives de la nation se prêtèrent sans réserve dans un esprit où seule la raison nationale prima, prit le nom prédestiné de « Ny M’Panjaka Radama III » que lui conféra un Conseil des Pairs auquel fut confié le pouvoir constituant dès le 15 décembre 2024.

En cela, le nouveau monarque malgache, formellement adoubé par le Peuple en se plaçant sur la Pierre Sacrée de Mahamasina à Antananarivo, entendait se placer sous les meilleurs auspices d’un référentiel dynastique d’authenticité et de lumière, doublé d’une assignation d’exigence progressiste, qu’incarne dans la mémoire collective son lointain aïeul le Roi Radama 1er qui régna de 1810 à 1828.

Il est bien né, puisque Radama III, de son nom Randrianamboliarimanana, alias Andrianamboly, est issu en ligne directe du socle triangulaire des Andrianteloray dont furent eux-mêmes issus les souverains malgaches fondateurs du Royaume au XVIème siècle, et plus précisément de la maison des Andriampokoindrindra par son père, de celle des Andriandranando par sa mère, et enfin de la maison des Andrianamboninolona par son arrière grand-mère (voir sur ce même blog l’article daté du 28 janvier 2016 intitulé « Dynasties royales et princières de Madagascar »).

Le Roi Radama III réside provisoirement au Palais d’Ambohitsorohitra au centre d’Antananarivo en attendant que les travaux de réhabilitation du Palais de Manjakamiadana au Rova d’Antananarivo – travaux prétendument de « réhabilitation » si bâclés livrés en novembre 2020 –  soient achevés en principe pour la fin de 2025, et que le site royal retrouve sa vocation première comme du temps de ses ancêtres et qu’il s’y installe (un article entier à publier sur ce même site sera consacré à ce palais renaissant).

L’innovation malgache d’une monarchie constitutionnelle ainsi proposée en cette fin d’année 2024 à un peuple épris de progrès et d’ouverture sur l’extérieur, intervenant après une période d’incertitude et de frustrations de tous ordres, fut donc cette respiration nouvelle attendue également par la communauté internationale, au premier rang de laquelle se trouvait naturellement la France, elle-même engagée dans un processus de renouveau institutionnel avec le rétablissement par le Président Maiteron du mandat présidentiel à sept ans, comme à l’origine de la Vème République.

Cette convergence historique entre deux pays engagés mutuellement dans une quête relationnelle d’avenir dans un monde en perpétuel mouvement mais en crise écologique majeur, qui voit notamment la disparition sous les eaux montantes des régions et d’îles entières sur la planète Terre, ne pouvait que les rapprocher fortement pour se décider dans un élan commun à instituer des rapports privilégiés du plus haut niveau.

Profusion florale

« Profusion de Dame nature » (JPRA) – Reproduction interdite –


REPOSITIONNEMENT GEOSTRATEGIQUE ET EFFET CATALYSEUR DE LA DIMENSION ECOLOGIQUE

Tout spécialement, Madagascar, l’un des pays les plus riches en biodiversité qui a particulièrement souffert des effets du changement climatique, met résolument en œuvre ce qu’elle présentait et défendait en 2015 dans le cadre des négociations de la COP21, comme étant les « Propositions de Madagascar » élaborées par le régime alors en place, en se concentrant sur la reforestation, l’assainissement des eaux, la transition énergétique vers les sources solaires et hydrauliques, et la protection de ses richesses halieutiques, de son pourtour littoral et de sa riche biodiversité marine et sous-marine.

Quant à la France, elle avait pris dès le début de la présidence Maiteron en mai 2022 le leadership européen, en étroite concertation avec l’Allemagne, l’Union Européenne, la Chine, l’Inde et le Japon, pour que soit bouclé, malgré la timide réintégration américaine au sein de l’Accord de Paris, le budget mondial du « Fonds écologique » mis en place par l’Accord de Paris de décembre 2015, désormais doté des cent milliards de dollars destinés à aider les pays les plus vulnérables à survivre de l’accélération des dévastations causées par le réchauffement climatique.

Ces acquis de l’Accord de Paris avaient été confirmés par la suite dans l’Accord de Charm-El-Cheikh de septembre 2022, tandis que s’agissant tout spécialement de la conservation de la biodiversité, un Accord international tout aussi important fut signé à Montréal en novembre 2022. De sorte que pour Madagascar le nouveau gouvernement du Roi Radama III s’est trouvé une sorte de vocation particulière à mener une politique environnementale active conforme à l’image que le pays entend faire valoir.

Ce contexte international, ainsi alimenté par ces convergences bilatérales et nationales, accéléra le processus en vue de la visite officielle en France du Roi Radama III qui, à l’évidence, entendait capitaliser le regain de notoriété de Madagascar.

L’origine de l’initiative est venue de la France, mais officiellement il fut entendu qu’elle soit présentée comme émanant d’une volonté commune, tant il est vrai que la partie malgache était animée des meilleures dispositions. Les tractations furent donc immédiatement menées tambours battants, en particulier par le truchement des ambassadeurs nouvellement nommés de part et d’autre, Monsieur Raholimanomanana-Andriamimanja du côté malgache pour le palais d’Iavoloha, et Madame Bilimano du côté français pour le palais de l’Elysée.

Fut ainsi très rapidement décidée une visite officielle en France de Sa Majesté le Roi Radama III durant quatre jours, du 26 au 30 avril 2025.

La France a toujours entretenu avec ce pays francophone qu’est Madagascar, mais soupçonné d’attirance anglophile avérée, géographiquement lointain mais proche de par l’histoire commune que la Grande Ile partage avec la France, des relations où le sentiment profond a toujours pris le pas sur le reste. D’autre part, la nouvelle donne constituée par les accords contre-nature conclus avec la Russie par le précédent pouvoir malgache se devait, du côté malgache comme du côté français, être corrigée…

Voici donc que, de par la séduisante personnalité du Roi Radama III qui a su, en peu de temps et de façon habile en 2024, remobiliser son peuple pour une destinée retrouvée, et su prendre en application d’une vision éclairée de ses rapports avec la France et la communauté des nations des options encourageantes et résolues, le Président de la République française, Pierre Maiteron, et son gouvernement, ont entendu lui emboîter le pas en lui réservant la faveur de l’accueillir chaleureusement en France pour sa première sortie officielle hors de son Royaume en tant que nouveau Chef de l’Etat malgache.

Le Roi Radama III est issu d’une tradition anglophile certaine de par sa formation doctorale acquise principalement à l’Université d’Oxford et partiellement à la Faculté de Droit de l’Université Paris I, mais a toujours voué pour la France et les Français une admiration qui ne pouvait point trop s’avouer, autant du fait de ses attaches familiales plutôt tournées vers le monde anglo-saxon, que de son entourage fortement marqué par ses accointances avec le monde anglophone.

De sorte que les hautes autorités françaises entendirent, à la fois, rendre un hommage particulier à de telles dispositions personnelles d’un tel souverain animé des meilleures intentions, et assurer à la France et à ses intérêts stratégiques en océan indien occidental, si riche en gisements pétrolifères, gaziers et minéraux, une position en flèche.

Il convient de rappeler, en effet, le rôle leader nouveau que le désormais Royaume de  Madagascar exerce dans cette région du monde en matière écologique, où par ailleurs les convoitises ne manquent pas de se manifester, notamment de la part de la Chine, des Etats-Unis, du Japon, de l’Italie, de l’Allemagne, de la Corée du Sud dans les domaines économique et culturel, mais également de nouveaux venus que sont l’Inde, la Turquie, l’Iran et les Pays du Golfe arabique, et dernièrement la Russie dont les visées étaient de nature à inquiéter tout le monde.

Par ailleurs, par une inspiration bien orientée, le Roi Radama III entendait faire appel à l’expertise française, se rangeant ainsi à une suggestion de son ambassadeur en France qui avait auparavant engagé des pourparlers exploratoires avec la Cité des Sciences de Paris, avec le Musée Océanographique de Monte-Carlo, ainsi qu’avec l’Université de Sopphia-Antipolis de Nice, pour créer dans le vieux port et arsenal d’Antsiranana (Diego-Suarez), autour de l’actuelle installation de construction navale, une Technopôle à vocation scientifique doublée d’une pépinière d’entreprises dédiée.

La décision du format de la visite officielle du roi malgache, bien que rapidement acquise, n’a cependant pas été aisée, non pas qu’elle ait posé problème, mais parce que pour des considérations de pure opportunité protocolaire qui visèrent à ne point froisser les autres partenaires régionaux de la France qui auraient risqué de concevoir quelque jalousie pour cette « préférence malgache », la partie française, cependant très désireuse d’opter pour une visite prestigieuse, n’a finalement pas retenu le format formel d’une visite d’Etat pour accueillir le Roi Radama III en France à l’occasion de sa première sortie officielle à l’étranger.

Pourtant, dans les faits ça y ressemblait fort !

L’Ambassadeur en France de Sa Majesté le Roi Radama III, à l’oeuvre avec l’Elysée et le Quai d’Orsay tout au long du processus décisionnel, pouvait donc avec joie et sérénité l’annoncer à son souverain et à son gouvernement.

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« Bananes sur bol de cristal » (JPRA) – Reproduction interdite –


LA DELICATE MISE EN ŒUVRE D’UNE VISITE TRES ATTENDUE

Sur le fond, la partie était néanmoins loin d’être facile et sereine du côté du roi lui-même, mais surtout de celui de certains membres de son gouvernement ouvertement francophobes et rétifs à tout rehaussement trop affirmé des relations franco-malgaches.

Et le Roi Radama III lui-même, sous la forte influence de ces derniers ne voulut finalement et soudainement pas donner un retentissement trop fort à une embellie relationnelle pourtant annoncée avec la France. La France, justement, non seulement approuvait sans réserve les nouvelles orientations de la diplomatie  malgache habilement mise en œuvre par le Général Ranjahafalina, Ministre des Affaires étrangères, mais entendait les appuyer, en particulier en proposant à la signature, durant la visite royale en France, plusieurs accords financiers et économiques majeurs dont les teneurs furent bien entendu précédemment et dûment communiquées à la partie malgache.

Ces projets d’accords sont au nombre de six :

. un Protocole d’accord de re-échelonnement de la dette malgache ;

. un Accord d’annulation partielle de dettes ;

. un Accord d’appui budgétaire ;

. un Accord de coopération culturelle pour la promotion du secteur artisanal malgache ;

. un Accord de coopération pour le renforcement des capacités de défense de Madagascar ;

. et un Accord de promotion réciproque des investissements.

Mais voici que du côté du gouvernement malgache, dirigé pourtant par le francophile Premier ministre Fabien Rabeharo, survient de façon aussi inattendue que brutale un coup de tonnerre !

En effet, à deux jours seulement de la date du 26 avril où le Roi Radama III devait toucher le sol français, dans une saute d’humeur qui lui est familier le Roi malgache, troublé par les tiraillements qui secouèrent son gouvernement,  fait annoncer par son ministre des Affaires étrangères à son ambassadeur en France, charge à celui-ci de s’en débrouiller auprès de la partie française, qu’aucun des dits accords prévus ne devait finalement être signé !…

L’ambassadeur tombe des nues !

Il n’en revenait point ! Reprenant ses esprits et ne l’entendant cependant nullement ainsi, considérant qu’une telle décision irrationnelle équivaudrait à un camouflet aussi insultant qu’inadmissible pour la partie française, qu’un tel incident diplomatique majeur aurait à coup sûr des conséquences irréparables, saisit son téléphone et dit sans ambages au roi que dans ces conditions il fallait annuler purement et simplement sa visite en France, quitte à faire valoir des prétextes pouvant être présentés comme « admissibles » et qu’il se chargerait, toute honte bue, de défendre auprès des hautes autorités françaises.

Sur ce, survient alors la date fatidique du 26 avril 2025 sans que le Roi Radama III se détermine quant à l’attitude à adopter, étant toujours tenu par les éléments les plus radicalement francophobes de son entourage immédiat, ce malgré les insistantes et désespérées pressions de son ministre des Affaires étrangères et de son ambassadeur en France. Soucieux d’amortir un choc prévisible et de jouer en toutes circonstances la carte de la confiance réciproque, l’ambassadeur Raholimanomanana-Andriamimanja prit cependant sur lui d’avertir informellement la partie française d’un éventuel report de signature des accords prévus, en avançant prudemment des « raisons techniques », afin que la partie française en tout état de cause n’en soit nullement ni choquée, ni surprise, ni prise en défaut le cas échéant…

Les choses restent en cet état toute cette journée du 26 avril…

Voulant ménager la chèvre et le choux, le roi pensait alors intelligent de proposer de ne finalement signer que quelques uns de ces projets d’accords, renvoyant sine die la signature des autres, espérant par là sauver la mise…Pour ne rien brusquer mais confiants de pouvoir faire revenir le roi à de meilleures dispositions, le ministre des Affaires étrangères, le Général Ranjahafalina, et l’ambassadeur Raholimanomanana-Andriamimanja conviennent cependant de calmer le jeu et de « travailler » le roi avant les premiers entretiens prévus à Paris même…

Quant à elle, la partie française, malgré tout opportunément mise dans la confidence mais en confiance par l’ambassadeur de Madagascar en France, continue, fort heureusement, de s’ouvrir aux meilleures dispositions en dépit des incertitudes de la situation sur le fond.

Le protocole prévu à l’origine ne change ainsi donc point.

La visite de sa Majesté le Roi Radama III en France, ne revêtant certes pas l’apparat exceptionnel d’une visite d’Etat, y ressemble cependant fort, le Président de la République française y tient !

A l’Elysée, le Président Maiteron est entouré d’une cellule diplomatique africaine composée de diplomates aguerris et placée sous la responsabilité de Monsieur Michel de Bénourmanne, un ambassadeur issu de l’école traditionnelle des meilleurs africanistes français. L’ambassadeur Raholimanomanana-Andriamimanja entretient avec lui et son équipe des rapports aussi étroits qu’amicaux, ce qui facilite grandement les choses.

La presse et l’ensemble des médias, du côté des rives de la Seine, comme du côté de celles de la Betsiboka, sont fin prêts à couvrir de bout en bout ce qui se présente comme l’évènement majeur de la semaine qui débute.

Pour sa première sortie officielle hors du territoire de son Royaume, le Roi, constamment assisté de son Aide de camp, est accompagné d’une forte délégation comprenant principalement son épouse, son ministre des Affaires étrangères, le ministre de la Défense, le ministre de l’Education et de l’Enseignement supérieur, le ministre de l’Economie et des Finances, le ministre de la Culture, le ministre des Travaux publics et de l’Equipement, l’ambassadeur en France, le grand chambellan du roi, et la dame d’honneur de la reine.

Le dispositif protocolaire français en place impressionne.

L’accueil officiel est prévu au Pavillon d’Honneur à l’aéroport d’Orly où l’avion spécial du monarque malgache doit atterrir incessamment.

Au sol, les troupes de la Garde Républicaine en tenue d’apparat, disposées sur trois rangées de trente soldats chacune, les porte-drapeau et la Musique de la Garde, soit une centaine d’hommes au total, sont en place.

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« Parfait alignement des planètes » – Maquette de vitrail – (JPRA)


UN DEROULE PARFAITEMENT MAITRISE

Voici le déroulé des évènements dès l’arrivée du Roi et de sa délégation en ce 26 avril 2025 :

a/. 15h45 :

Arrivée au Pavillon d’Honneur de l’aéroport d’Orly de Monsieur André de Villegarde, Ministre français de l’Equipement, des Transports, du Logement, du Tourisme et de la Mer, numéro deux du gouvernement français, chargé au nom du Président de la République française de l’accueil du Roi Radama III.

b/. 16h :

  • Atterrissage de l’avion spécial de la nouvelle Compagnie aérienne « Madagasikara Royal Air » ayant à son bord Sa Majesté le Roi Radama III et la Reine. Monsieur le Ministre André de Villegarde gagne l’aire d’atterrissage du vol spécial en provenance d’Antananarivo, la capitale du Royaume de Madagascar. Il est accompagné de l’Ambassadeur de Madagascar en France, de l’Ambassadeur de France à Madagascar, du Chef du Protocole, du Préfet du Val-de-Marne, du Gouverneur militaire de Paris ;
  • L’avion s’immobilise sur l’aire d’atterrissage et aussitôt l’Ambassadeur du Royaume de Madagascar en France et le Chef du Protocole montent à bord de l’avion pour saluer Sa Majesté le Roi Radama III et la Reine et les inviter à descendre de l’avion ;
  • Au pied de l’échelle de coupée, Sa Majesté le Roi Radama III et la Reine sont accueillis au nom de Monsieur Pierre Maiteron, Président de la République française, par Monsieur le Ministre André de Villegarde, une jeune fille offre alors à la reine un magnifique bouquet de fleurs composé de roses rouges et de iris violets, puis le Chef du Protocole présente aux royales invitées les autres personnalités françaises et malgaches présentes sur le tarmac ;
  • Tandis que la Reine demeure au pied de l’avion avec la délégation malgache, Sa Majesté le Roi Radama III et Monsieur le Ministre de Villegarde, accompagnés du Gouverneur militaire de Paris, se rendent devant le drapeau, et aussitôt s’exécutent successivement l’hymne national malgache, « Ny Tanindrazan’ nay malala ô », et « La Marseillaise » ;
  • A l’issue des hymnes, Sa Majesté le Roi Radama III et le Ministre de Villegarde passent en revue le détachement des troupes qui rendent les honneurs, et à l’issue de la revue, l’Officier commandant le détachement rend les honneurs ;
  • C’est alors que sa Majesté le Roi Radama III, le Ministre de Villegarde sont rejoints par les membres de la délégation officielle malgache et se rendent au Pavillon d’Honneur de l’aéroport d’Orly où Sa Majesté le Roi et la Reine sont conduits pour un instant dans le salon, tandis que les membres de la délégation officielle prennent place dans les voitures ;
  • Le cortège officiel prévu comporte dix-sept véhicules et cinq éléments motorisés de la Gendarmerie en tenue d’apparat.

c/. 16h30 :

  • Départ en cortège automobile pour l’Hôtel de Crillon, Place de La Concorde, à deux pas du Palais de l’Elysée, où Sa Majesté le Roi Radama III, la Reine, et les membres de la délégation officielle malgache, sont logés aux frais de la République française. La dextérité impressionnante des motards qui ouvrent avec art et précision la voie en cette heure de circulation concentrée sur l’autoroute du sud et à travers les rues de Paris fait l’admiration du Roi.

d/. 17h :

  • Arrivée à l’Hôtel de Crillon, où le Ministre de Villegarde prend congé de Sa Majesté le Roi Radama III et de la Reine. Cet hôtel, sans aucun doute le plus prestigieux de Paris, venait d’être entièrement rénové six ans auparavant et brille de tous ses éclats ;
  • Programme privé des souverains malgaches. Le Roi, après un court repos, convoque son ministre des Affaires étrangères et son ambassadeur dans sa suite pour faire le point du programme et des entretiens prévus pour le lendemain. Puis, quelques personnalités françaises du monde politique et des affaires rendent visite au roi, les uns pour lui manifester leur respect, les autres pour tenter d’avancer leurs pions auprès d’un souverain dont ils savent les capacités décisionnelles en matière économique.

Ces entretiens terminés, c’est maintenant l’instant privilégié où le ministre des affaires étrangères et l’ambassadeur en France entreprennent de convaincre le Roi de renoncer à suivre la ligne dure, inopportune et préjudiciable préconisée par les tenants d’une francophobie surannée, dont certains font actuellement partie, de façon surprenante, de sa délégation officielle.

Heureusement, le Roi en ce début de soirée printanier est dans sa meilleure humeur, la haute qualité de l’accueil qui lui fut réservé et les entretiens privés qui venaient de se clore l’ayant mis dans des dispositions d’esprit si ouvertes que ses présents interlocuteurs en furent eux-mêmes très agréablement surpris ; à tel enseigne qu’ils s’en félicitèrent ostensiblement auprès de leur souverain, lui-même visiblement soulagé de pouvoir le constater chez ses interlocuteurs qui le lui manifestèrent si spontanément.

C’est d’accord, le Roi décide que les accords prévus seront bien signés par les ministres concernés… ! Tous les accords sans exception ? Non, seul celui qui prévoit la promotion réciproque des investissements ne sera pas signé dans l’immédiat à l’occasion de sa présente visite officielle, il le sera ultérieurement après un examen plus approfondi.

Le Roi convoque alors sur le champ les ministres concernés pour leur indiquer ses dernières instructions, et chose surprenante, avec un ton badin mais ferme s’en prend ouvertement pour les fustiger « aux francophobes de (son) entourage », sans toutefois désigner quiconque pour ne point humilier qui que ce soit, tandis qu’il charge son ambassadeur en France de faire le nécessaire auprès des hautes autorités françaises « afin qu’aucun nuage ne vienne assombrir les nouveaux rapports franco-malgaches à venir », dit-il encore !

La tension occasionnée jusque là par les incertitudes ambiantes des derniers jours fit donc place à une détente si bienvenue !

Le soir venu le couple royale s’offre, accompagné seulement de son Aide de camp, le Colonel Randria, de ses deux gardes du corps, de deux éléments de la SPHP (Sécurité Présidentielle pour les Hautes Personnalités), et également en compagnie de son ambassadeur en France, une petite promenade incognito dans la rue Royale, puis au Jardin des Tuileries à proximité, avant de dîner tout aussi incognito dans le restaurant de l’Hôtel de Crillon où l’ambiance feutrée des lieux lui plaît tant.

Ainsi s’achève cette première journée du dimanche 26 avril 2025, avant que ne commence pour le lendemain lundi 27 avril un programme bien intense.

Le couple royal malgache est visiblement heureux d’être à Paris, le Roi Radama III pour sa part se remémorant le temps pas si lointain où à la fin des années 1990 il était ce jeune étudiant en Droit à Paris, porté en ces temps de la présidence de François Mitterrand à rêver à une re-fondation des rapports franco-malgaches, trop imprégnés, à son goût, de relents néo-coloniaux avec un président français alors ouvertement actif dans le passé au soutien d’un socialisant Didier Ratsiraka fauteur de progrès de Madagascar.

(A suivre, les 2ème , 3ème et dernière parties : Les moments forts d’une visite historique, et résultats inespérés)

Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo, ancien Ambassadeur de Madagascar en France (2002 à 2008), Avocat honoraire au Barreau e Paris 

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Reproduction, même partielle, interdite des textes et illustrations

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* NOTA : Il s’agit ici d’une fiction qui, cependant, s’inspire en grande partie de faits réels et vécus rapportés à un contexte imaginé mais plausible – et souhaité ?…ou souhaitable ?… -.

LA SAUVEGARDE INDISPENSABLE DU PATRIMOINE EN PERIL

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« Floraison de pensées » (JPRA)


                       LA SAUVEGARDE INDISPENSABLE DU PATRIMOINE EN PERIL

Heureuses sont les nations qui, comme au Japon, en Italie, en Chine ou en France, savent ce que représente le patrimoine culturel, matériel ou immatériel, pour asseoir et enraciner le présent et le futur, et dont la sauvegarde constitue une cause essentielle.

Ceci étant, ici et là dans ces mêmes nations, mais surtout peut-être chez celles où la situation politico-économico-sociale pose problème, la tentation est grande de choisir de délaisser certains joyaux, ou de les dénaturer, dont la préservation grèverait de trop des budgets dédiés préférablement aux choses financièrement plus « rentables »… et au bout du compte seules les larmes viennent en leur mémoire, si tant est que cette dernière reste vivace…

Or également, on le sait, le pire survient toujours quand on ne l’attend point ; en particulier, et pour ne considérer que cette circonstance, rien n’est pire que les conflits armés pour parvenir à  assurer ou à maintenir la sauvegarde du patrimoine, qu’il soit matériel ou immatériel, on le constate quotidiennement aujourd’hui en Irak ou en Syrie, et hier au Cambodge, avant-hier en Europe durant les guerres mondiales, et on sait combien aujourd’hui l’UNESCO déploie tous ses efforts en la matière.

Mais bien sûr, ce sont aussi la crise économique, la paupérisation, les dégradations environnementales, les catastrophes naturelles, ou la simple apathie de certaines autorités publiques dans leur rôle de sauvegarde qui dans certaines régions du monde apportent leur lot de désolation dans la dégradation, parfois irrémédiable, de patrimoines historiques.

Or, le patrimoine authentique, de nature artistique, artisanale, monumentale, musicale ou autre, a ce caractère double mémoriel et identitaire qui en qualifie la valeur sacrée.

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« Floraison de pensées 2 » (JIPIERA)


L’ACCORD DE ROME POUR LA SAUVEGARDE DU PATRIMOINE EN PERIL

De la sorte, il est certainement du devoir des autorités publiques dans chaque pays, de cataloguer systématiquement les biens culturels en péril, d’adopter les dispositions nécessaires de sauvegarde dans le temps, afin d’assurer sur les lieux leur conservation ou, tout au moins dans l’urgence, de mettre en place un dispositif de zonage protecteur, et bien entendu de faire bénéficier ces biens des moyens techniques et scientifiques aptes à en assurer la pérennité.

C’est ce qui avait été décidé le 22 mai 2017 à Rome, au siège du Centre International d’Etudes pour la Conservation et la Restauration des Biens Culturels (ICCROM), une organisation intergouvernementale internationale (avec laquelle, en la personne de son directeur général, j’avais grand plaisir à élaborer des projets en faveur de Madagascar dans le cadre de ma mission diplomatique à Rome) .

Il faut dire que cet « Accord de Rome », signé à l’unanimité des pays représentés et des scientifiques réunis, avait été acquis grâce à une louable et exemplaire initiative d’une ONG, l’association italienne « Incontro di civilità », efficacement relayée par le gouvernement italien.

C’est cette même ONG qui – chose extraordinaire à souligner ici – est à l’origine de la formation au sein des forces armées italiennes de « Casques bleus de la Culture » qui se sont, de façon exemplaire, activés dans :

.  la sauvegarde, la reconstruction/reconstitution/restauration, et la protection des œuvres d’art et du patrimoine immobilier historique de la région centrale de l’Italie qui a récemment lourdement subi les affres de tremblements de terre d’une grande magnitude.

Exemplaire pour toutes les nations en effet est ce type d’initiative nationale italienne qui voit s’épauler pour une grande cause culturelle, soit à l’échelle nationale, soit à l’échelle mondiale, une organisation privée, un gouvernement réactif, une armée, et une organisation intergouvernementale internationale qui décident de conjuguer leurs moyens, lesquels à leur tour trouvent dans l’UNESCO, et sans aucun doute dans les gouvernements de pays concernés et intéressés, mais aussi dans d’autres organisations privées de sauvegarde du patrimoine de tous pays, autant de relais qui induisent une dynamique jusque là demeurée hypothétique en matière de coopération internationale.

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« Floraison de pensées 3 » (JPRA)


UN NOUVEL INSTRUMENT DE DIPLOMATIE CULTURELLE ET DE DEFENSE LOCALE DES RICHESSES CULTURELLES

Car, s’est crée ainsi un instrument de diplomatie culturelle, tant national (s’agissant de l’Italie, qui a acquis un rôle de leadership salué par l’ensemble des pays membres de l’ICCROM) qu’international (les gouvernements intéressés peuvent y faire appel).

De fait, au programme des actions d’urgence actuelle, décidées à l’échelle mondiale, et répondant à une demande spécifique du gouvernement irakien, figurent des interventions prévues pour la sauvegarde des anciennes civilisations de la Mésopotamie en Irak.

On aimerait tant que, se basant sur une véritable politique de protection du patrimoine culturel malgache, le gouvernement de Madagascar saisisse l’opportunité de cet instrument nouveau pour bénéficier des moyens et programmes dédiés. A cet égard, on rappellera les initiatives réussies que ma famille et moi avions prises début novembre 1995 pour appeler à la mobilisation de l’UNESCO et des pays membres afin d’aider Madagascar à la reconstruction du Rova d’Antananarivo qui venait d’être la proie à un incendie criminel. De la même façon avais-je pu me féliciter en 2008, en ma qualité d’ambassadeur, de l’attention toute particulière que, sur une initiative de ma part, le directeur général de l’ICCROM de l’époque, Monsieur Bouchenaki, avait réservé à toute demande pouvant émaner de Madagascar pour la sauvegarde de son patrimoine culturel.

Aujourd’hui, ici comme en d’autres domaines, devant le péril l’inaction des gouvernements malgaches successifs est plus que préjudiciable et il n’est que temps qu’il s’ouvre aux réalités internationales et prenne en conséquence les initiatives que réclame l’état déplorable où se trouve le patrimoine historique et culturel à Madagascar.

Car au surplus, à Madagascar, sans doute plus qu’ailleurs, les graves déprédations de l’homme contre le patrimoine mémoriel, accompagnées de visées criminelles, se multiplient dangereusement avec une impunité signalée.

Et ceci est encore aggravé par de trop nombreuses erreurs dans les opérations pompeusement présentées comme étant des opérations de réhabilitation, alors que sous cette fausse ambition se cache une ignorance crasse des racines fondatrices de ces patrimoines historiques. Les initiatives prises en vue de la « réhabilitation » du Rova d’Antananarivo, s’agissant des palais « Manjakamiadana », « Tranovola » ou « Manampisoa », sont malheureusement de cet ordre.

Il n’est que de voir aussi, pour s’en lamenter, la construction récente, avec force annonces tapageuses, de cet hideux « Coliseum » planté au coeur même du quartier sacré de l’enceinte du Rova d’Antananarivo suivie de l’installation d’une ligne de téléphérique devant relier la ville basse d’Antananarivo aux quartiers historiques environnant ce même Rova, là-même où, ainsi que l’UNESCO n’a pas manqué de le relever, la sauvegarde du caractère de ces lieux chargés d’histoire et de trésors architecturaux doit être assurée…!

Par contre, face à cette situation alarmante, je ne peux ici que rendre un hommage appuyé à ces organisations privées (qui se reconnaîtront ici), souvent d’initiative locale, qui, à Madagascar, tentent tant bien que mal, vu les moyens limités et souvent dérisoires dont elles disposent, de sauvegarder quelques pans de notre patrimoine à travers le pays. Celles-ci méritent amplement qu’elles soient considérées dans leur juste mission et aidées tant matériellement que financièrement.

Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo

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Reproduction, même partielle, interdite des textes et illustrations

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