
« Ny Taniko » – Huile sur toile – (JPRA)
LA MARCHE DU PROGRES
Un pays en crise aussi grave que celle que connaît Madagascar actuellement demande une rencontre fondamentale : celle d’un homme ou d’une femme qui croise son chemin au carrefour du progrès.
Mais, cet homme ou cette femme doit être porteur (porteuse) d’un projet fort, structuré et qui va aussi loin qu’en profondeur, loin des recettes ou des programmes qui empruntent de trop au marketing.
Il lui faut épouser cette Nation Malagasy dans toute sa diversité parfois turbulente. Bref, être le (la) Président(e) de TOUS les Malagasy sans exclusive. Il faut que cette notion ait du sens et qu’elle se décline à tous les niveaux de la gouvernance publique.
Quatre piliers, pour bien asseoir ce projet, doivent servir de base à des actions à mener de front.
La perspective de la prochaine prise de fonction du (de la) prochain Président (e) de la République issu(e) de l’élection présidentielle de novembre/décembre 2018 donne l’occasion de les valoriser.
I – S’ANCRER DANS L’HISTOIRE
Il est nécessaire d’avoir en conscience les durs enseignements de l’histoire de Madagascar, laquelle se caractérise par un trop fort déficit de progrès.
Il est de fait qu’en sept siècles d’histoire connue de notre pays, du XVème au XXIème siècles, seul un total de quelque un siècle et demi, toutes périodes confondues, fut marqué par le progrès spirituel, institutionnel, structurel, économique, social et matériel.

« Madagascar dans la pierre » (JPRA)
Mais, encore faut-il souligner que la dynamique de progrès s’accompagnait elle-même de soubresauts plus ou moins contrôlés, dont les remèdes s’apparentaient plus à du colmatage successif qu’à des réformes en profondeur. A cet égard, les périodes les plus récentes, celles du XXème et du XXIème siècles, avec le régime de Philibert Tsiranana et celui de Marc Ravalomanana, font apparaître la superficialité des orientations préconisées, dont certaines ne purent d’ailleurs être appliquées. Et aujourd’hui, Madagascar et son peuple sont replongés depuis 2009 dans un abîme sans fond.
Cependant, il est un autre fait que dans leur histoire mouvementée les Malagasy ont eu, durant les périodes de progrès ci-dessus relevées, leurs heures de gloire, prouvant s’il en faut leur capacité à se mobiliser, à se dépasser et à prospérer dans un élan commun.
C’est pourquoi, l’ardent devoir qui échoit maintenant à celui (celle) qui, par sa volonté, sa vision et sa force de caractère, entend épouser le destin de tout un peuple, paver des meilleures intentions et réalisations le droit chemin de toute une nation, et fixer un cap visible, palpable et certain au navire Madagascar, est donc de retrouver cet élan commun et d’entrer de plain pied dans l’Histoire consciente et assumée de son pays.
C’est-à-dire, habiter cette Histoire, la travailler dans le tréfonds mental du peuple qui la façonne, et l’orienter de telle sorte que ses cycles d’évolution se conjuguent et se renforcent dans une profonde démarche dialectique de progrès.
Bref, initier une spirale vertueuse qui ancre Madagascar et le peuple malagasy dans les mérites de son histoire trop maintes fois contrariés, une spirale vertueuse qui aille au-delà d’une simple quête mais concrétise une véritable vocation sur le long terme.
C’est cette vision propre aux gens d’Asie et d’Afrique épris de progrès, qui entend s’inscrire également dans une dynamique linéaire propre à la conception chrétienne du progrès humain, qui doit animer le credo de celui (celle) qui se destine en conscience à piloter le navire Madagascar.
Il (elle) doit savoir également combien complexe est la société malagasy faite de diversité humaine et régionale mais partageant les mêmes valeurs civilisationnelles, les mêmes épreuves et un espoir commun.
II – UN ETAT FORT, DES INSTITUTIONS EFFICIENTES ET RESPECTEES
Un triste constat saute aux yeux : le dérèglement de l’appareil étatique et la faillite morale et financière de l’Etat malagasy qui, par ailleurs, ne peut s’appuyer sur aucun levier pour y remédier.
Il faut donc y remédier urgemment.
- Tout d’abord, il convient de rappeler que ce qui tient actuellement lieu de charte nationale est une Constitution au rabais dite de la « IVème République », adoptée irrégulièrement et dans la précipitation par un pouvoir de Transition non qualifié en la matière, mais finalement acceptée par défaut. De plus, les mécanismes institués par cette constitution sont d’une complexité et d’une confusion aussi notoires qu’incompréhensibles, car à la base cette constitution n’a été conçue que pour affaiblir l’Exécutif.
Sans nul doute, tous les maux de la mauvaise pratique institutionnelle passée et actuelle depuis son adoption en 2012 en tirent leur origine. Ce, notamment en ce qui concerne :
. la répartition des pouvoirs entre l’Exécutif et le Parlement ;
. l’exercice des prérogatives à l’intérieur de ces pouvoirs ;
. le fonctionnement des rouages institutionnels et administratifs ;
. l’exercice par la Justice de son indépendance et de ses prérogatives ;
. la mise en œuvre de l’Etat de droit et la protection des droits fondamentaux.
C’est dire qu’il s’agira, en premier lieu, ce dans un délai raisonnable, de procéder à un recentrage indispensable de la charte fondamentale, de sorte que la mise en pratique des principes d’une Bonne Gouvernance démocratique soit compatible avec le concept d’un Etat fort. Car, il faut une rupture avec l’impasse institutionnelle actuelle.
Ceci doit aller de pair avec leur optimisation, au moyen de leur valeur opérationnelle intrinsèque et leur articulation dans la cohérence afin que l’Exécutif, en charge de conduire dans une vison claire les destinées de la nation puisse s’y consacrer pleinement sans être embarrassé par le jeu stérile des combinaisons politiciennes.

« Couple d’oiseaux sur fruits » (JPRA)
Ceci suppose que le (la) Président(e) de la République puisse choisir librement son Premier ministre sans que ce dernier émane obligatoirement du Parlement ou que le Parlement donne son aval dans l’exercice de ce choix ou sur la personne de l’impétrant.
Ceci passe, soit par une révision constitutionnelle en profondeur équivalent à une refonte de celle existant actuellement, soit par l’adoption d’une nouvelle Constitution. Dans un cas comme dans l’autre, le choix sera entre la voie référendaire et le vote du Parlement réuni en Congrès. Les circonstances dictées par la conjoncture politique du moment le détermineront.
- Dans la structuration de l’appareil étatique, et s’agissant tout particulièrement des relations entre l’Exécutif et le Parlement, surtout que ce dernier est dans sa pleine configuration avec le nouveau Sénat, il s’agira de faire en sorte que les trois principaux pôles de compétences du Parlement soient pleinement respectés et fonctionnent effectivement : contrôle des actes du gouvernement, vote des lois, proposition de lois, initiatives diverses dans les limites de ses prérogatives.
Les pouvoirs et prérogatives inhérents à ces pôles de compétences nécessitant des capacités particulièrement aigues si l’on veut que le travail parlementaire soit efficace, des cessions de formation à la fonction parlementaire s’avèrent indispensables.
- De telles cessions de formation doivent concerner également le personnel administratif à tous les niveaux. Car, ce qui caractérise l’administration malagasy actuel est le dévoiement de ses missions d’intérêt général. Pour le politique comme pour le fonctionnaire, le service du peuple ne saurait se résumer à cette notion ambiguë de « redevabilité » mais bien dans l’application quotidienne des principes premiers de l’intérêt général et de la « res publica ».
- Quant à l’édifice institutionnel au sommet de l’Etat central, celui-ci ne saurait être complet si l’on ne mettait pas en place, en temps opportun mais sans tarder, un Conseil Economique, Social et Environnemental. Ceci est une préconisation de longue date de l’Organisation des Nations Unies qui, à travers sa Commission Economique et Sociale, incite les Etats membres à se doter d’un organe consultatif dont le rôle est d’associer étroitement les forces vives des nations aux orientations stratégiques et politiques sectorielles dans les domaines économiques, professionnels et sociaux.
Dans un pays aussi vaste que diversifié comme Madagascar, avec ses potentiels énormes et la nécessité de mobiliser ses forces vives, la mise en place d’un tel Conseil s’avère plus qu’opportun. De plus, compte tenu de la riche biodiversité malagasy et de la récurrence des problématiques environnementales et écologiques, la dimension environnementale doit être incluse dans l’érection de ce nouvel organe.
Le Conseil Economique, Social et Environnemental de Madagascar s’inscrit donc en bonne place dans l’architecture institutionnelle à venir.
- Un Etat fort et des institutions efficientes et respectées supposent une Justice indépendante, impartiale et disant le Droit in concreto.
L’unicité des procédures doit être la règle pour une Justice accessible à tous, et les procédures spéciales l’exception face aux spécificités de certaines matières. Sans doute y a-t-il à renforcer l’absoluité de l’indépendance des juges et la relativité de celle du parquet, ce afin que le justiciable se reconnaisse pleinement dans une Justice qui est prononcée au nom du Peuple.
Dans l’exercice de la Justice il est par ailleurs important que la garantie des droits de la défense soit réelle et effective, que le respect mutuel entre magistrats et avocats soit une règle bien établie, de même qu’il est une constante à surveiller, celle que l’accès à la Justice soit facilité à tout citoyen.
Quant aux forces de police et de l’ordre public (gendarmes ou, occasionnellement, l’armée), l’absolu respect des droits et libertés fondamentaux, de même que l’habeas corpus, exigent que leurs actes entrant dans le cadre de la police administrative ou de missions répressives soient placés sous contrôle strict.
L’Etat de Droit se doit de réunir ces conditions minimales, l’objectif étant que dans la quotidienneté et concrètement le constat d’un état (avec un petit « e ») de Droit s’impose avec éclat.
III – UNE SOCIETE SOLIDAIRE POUR UNE ECONOMIE INTEGREE
AU NIVEAU LOCAL
- Structurellement, il est temps de donner un contenu concret aux valeurs proprement malagasy que sont le « Fihavanana » (sociabilité) et le « Firaisan-kina » (solidarité-entraide).
Certes elles se traduisent institutionnellement par deux collectivités de base que sont les « Fokonolona » (communauté villageoise ou urbaine) et les « Fokontany » (structure administrative de base). Mais, leur pleine intégration dans les rouages administratifs doit être mieux assurée et valorisée, d’abord par la reconnaissance formelle de leur instance décisionnelle, et ensuite par une intégration de leurs décisions dans les normes juridiques existantes au niveau local.
Une société réellement solidaire à sa base constitue une condition première pour une économie intégrée souhaitable pour un pays à redresser, dans lequel la satisfaction des besoins de première nécessité réclame un engagement de tous et de tous les instants. Il y va également du sentiment collectif d’intérêt commun à susciter et à encourager, ce qui ne peut que favoriser la mobilisation nécessaire à toute politique de développement digne d’intérêt.
De la valorisation et de l’optimisation opérationnelle de telles structures dépend également la reconstitution indispensable et vitale du tissu social et économique local, tant il est vrai que chaque localité malagasy recèle ses propres richesses en termes d’activités culturales, artisanales, agricoles ou vivrières, culturelles et artistiques. Pour que ces activités de proximité retrouvent vie et vigueur et nourrissent toute une économie locale, il est en effet nécessaire de redonner leur vraie vocation aux valeurs et structures ci-dessus décrites.
- Ce qui est vrai au niveau local l’est, avec une économie d’échelle plus grande et des exigences spécifiques, à hauteur de leurs caractéristiques propres, des communes, communautés de communes, districts et régions. Avec cependant cette dimension incontournable que représente la mise en œuvre d’un plan communal ou régional de développement.
Cette dimension planificatrice à ces niveaux constitue d’ailleurs un des leviers principaux du redressement et du développement de Madagascar.
IV – PLANIFICATION ECONOMIQUE ET SOCIALE,
REDISTRIBUTION DES REVENUS ET MAITRISE DES MARCHES
Le concept de planification ne procède pas d’un choix idéologique ; c’est une nécessité technique de vision et de cohérence opérationnelles dans un esprit systémique et holistique, dictée par les exigences du redressement, du relèvement et du développement qu’ont connu en leur temps de reconstruction après-guerre les plus grandes puissances (Etats-unis, France, Allemagne, Japon, pour ne prendre que ces exemples historiques), ce à la suite d’une période de crise majeure résultant de la seconde guerre mondiale qui avait mis à bas toute une nation.
C’est, a fortiori, le cas actuel de Madagascar qui, pourtant, ne sort ni d’une guerre ni d’une catastrophe quelconque de grande ampleur, mais souffre dans sa chair d’années de gabegie et de mal gouvernance notoires.
La planification préconisée aura un double caractère : directif pour tout ce qui concerne la politique structurelle à long terme ; incitative en ce qui concerne les objectifs sectoriels de court et moyen termes.
A – ORIENTATIONS DIRECTIVES :
Il est vain de parler de croissance ou de reprise économique si les conditions et structures de base ne sont pas au rendez-vous et si le tissu économique ne s’y prête pas. C’est la raison même d’une planification cohérente, en particulier dans ce qu’elle a d’orientations directives en matière structurelle.
- Au titre de la politique structurelle qui doit viser la (re)constitution d’un tissu économico-social cohérent et devant être au soutien de l’émergence d’activités de proximité (voir ci-dessus), sont particulièrement concernés :
– les petites unités industrielles de production locale ;
– les petites et moyennes exploitations agricoles, maraîchères et de la pêche en eau douce ou en mer ;
– les greniers à céréales pour assurer le stockage;
– les entreprises artisanales.
D’autre part, au niveau communal, du district ou de la région, sont notamment concernés :
– les industries de production ou de transformation liées à leurs spécialités particulières ;
– les structures coopératives agricoles et de la pêche ;
– les groupements d’intérêt économique de mise en commun de matériels et/ou de conquête de marchés ;
– la réactivation des syndicats professionnels sectoriels et des chambres de commerce ;
– la mise en place d’un système de micro-finance ;
– la mise en place de structures associatives d’activités et de sports destinées à la jeunesse locale ;
– le renforcement du réseau de dispensaires et de mise à disposition de médicaments.
Enfin, au niveau national, sont notamment concernés :
– la mise en place d’un système financier dédié au soutien des activités des entreprises (référence au système bancaire japonais fondé sur les banques d’affaires qui s’impliquent au soutien des entreprises de leurs réseaux) ;
– la généralisation de syndicats professionnels et sectoriels ;
– un plan d’urgence en équipement de base (routes et chemins, ouvrages d’art, bâtiments publics, canalisations, etc…) ;
– un plan de reconstitution des infrastructures portuaires, aéroportuaires et de chemin de fer, et à ce titre :
. de redonner à Diego-Suarez sa vocation industrielle autour de son arsenal et de son chantier naval, d’y créer une pépinière d’entreprises à vocation technologique et scientifique (technopôle + clusters);
. s’agissant de Taomasina et de Majunga, de renforcer leur vocation respective, en particulier en matière de liaisons maritimes régionale et internationale, mais aussi en matière de formation aux métiers de la mer et de recherches marines et sous-marines;
. en ce qui concerne Tolagnaro, de renforcer sa vocation industrielle autour de son port dédié à l’extraction minière ;
. s’agissant de Tulear, y développer la pêche artisanale et y créer un centre de la chaîne du froid, destiné à développer l’exportation de produits de la pêche sur les marchés intérieur, européen et d’autres continents ;
. s’agissant d’Antalaha, y développer sa vocation de construction navale spécialisée dans les boutres et petites embarcations destinées à la pêche artisanale et aux liaisons locales par cabotage, et en faire une plaque tournante touristique régionale ;
– la constitution d’un capital technique et technologique par l’encouragement des transferts technologique en input (cf. l’expérience chinoise en la matière), l’appui aux laboratoires universitaires, l’appui au développement des R&D au sein des entreprises, le développement de l’industrie électronique et de l’internet ;
– la généralisation de la chaîne du froid destinée à l’agriculture, à la pêche et à la santé publique, grâce en particulier à une coopération avec l’Institut International du Froid ;
– assurer la sécurité alimentaire, nutritionnelle et sanitaire, notamment par la mise en place d’un réseau national en la matière et en utilisant les moyens de UNITAID.

« Plateau de fruits dans la nuit » – Pastel – (JPRA)
B – OBJECTIFS CHIFFRES ET/OU CIBLES :
Autant il est vain de parler de croissance ou de reprise économique sans la mise en place et en œuvre des conditions structurelles visées plus haut, autant pour amplifier et donner du champ à ces orientations, il est nécessaire de s’appuyer sur ce qui doit être considéré comme les leviers du redressement et de la croissance.
Les objectifs chiffrés et ciblés doivent se concevoir sur trois échéances : l’urgence immédiate, le court terme, le moyen terme et le long terme, le tout avec une articulation dialectique en amont et en aval, l’interaction des objectifs respectifs devant être assurée.
De tels objectifs concernent les secteurs porteurs de l’économie malagasy, tels que :
Ba/. l’agriculture, l’élevage et la pêche. Il s’agit des trois secteurs-clés de l’économie malagasy. Or, dans ces secteurs Madagascar recèle des richesses énormes qu’il convient de valoriser à tous points de vue : développer les petites exploitations, spécialisation par produits, créer des structures aptes à développer les grandes entreprises agricoles, d’élevage et de la pêche, développer un système financier dédié à l’agriculture, à l’élevage et à la pêche, développer et faciliter l’usage de matériels agricoles, d’élevage et de pêche ;
Bb/. les sources d’énergie et le réseau hydraulique : Madagascar recèle des sources d’énergie fossile (pétrole, gaz) qu’il convient de maîtriser (eu égard aux besoins nationaux, mais aussi aux objectifs de l’Accord de Paris de décembre 2015 en matière de changement climatique et de transition énergétique), mais se doit désormais de cibler les sources d’énergie renouvelable, notamment en adoptant des objectifs de transition énergétique. A ce titre, le réseau hydraulique de Madagascar étant énorme, il s’agit de se fixer des objectifs précis pour en développer l’exploitation rationnelle et écologique ;
Bc/. les mines et les richesses en pierres précieuses et semi-précieuses : ici également les richesses de Madagascar sont immenses et demandent à être maîtrisées dans le cadre d’une politique dont l’objectif principal sera de soustraire le pays et son peuple de l’exploitation éhontée d’intérêts opaques et de trouver avec des partenaires honorables des formes d’exploitation profitable à tous;
Bd/. le tourisme, avec un souci sélectif strict, les objectifs principaux étant : de valoriser le potentiel touristique existant ; de développer un tourisme durable, notamment par la création et l’appui pour un réseau hôtelier de bas et de moyen de gammes et mettre en place des services de qualité en termes d’organisation, d’hygiène et de rentabilité ; promouvoir les destinations de tourisme écologique (réserves protégées) et historique (sites et patrimoine).
Be/. les produits culturels, artistiques et des métiers d’art. La diversité culturelle, la création artistique et la maîtrise artisanale sont une des marques qui distinguent Madagascar. Autant il ne s’agit pas d’imposer à la culture et aux arts une politique d’Etat, autant il convient de mettre en place une politique incitative intelligente visant à les appuyer dans l’excellence et la qualité de leurs œuvres, y compris à l’exportation, notamment en mettant en place un système statutaire comparable au statut de « Trésor vivant » au Japon ou de « Meilleur ouvrier ou artisan» en France.
Bf/. la jeunesse. Il faut la considérer comme étant une des forces de Madagascar. Elle représente environ 60% de la population, et ne serait-ce qu’à ce titre l’Etat se doit de l’appuyer fortement dans ce qu’elle représente comme force vive et d’avenir. La politique à destination de la jeunesse malagasy (de 18 à 30 ans), fondée sur le concept de « Mijoro ny Tanora malagasy » (« La jeunesse malagasy se mobilise »), aura les volets suivants : aide financière à la création d’entreprise, exemption de charges fiscales et sociales pour les deux années de démarrage de l’entreprise, formation aux métiers par l’apprentissage, appui aux organisations professionnelles de la jeunesse, appui aux associations sportives et dédiées aux activités sociales.
Sur l’ensemble de ces objectifs, un plan « le Plan Mandrosoa », que nous avons conçu et élaboré, et appliqué à quatre régions phares (Bongolava, Itasy, Androy et Anosy), a été élaboré à la demande du ministre malagasy de l’Agriculture en 2015 et est immédiatement prêt à être mis en œuvre.
REDISTRIBUTION DES REVENUS ET MAITRISE DES MARCHES :
Les conditions de base permises par la planification telle que décrite ci-dessus doivent permettre la mise en place d’une politique fiscale qui ne soit pas perçue comme une charge mais entrant dans le cadre positif d’une politique de distribution de revenus.
A ce titre, il convient de combiner les exigences considérées avec des orientations claires visant à réintégrer dans l’économie formelle l’économie dite « informelle » qui prolifère et dont la permanence est source dangereuse de déstabilisation socio-économique et de précarisation permanente.
Instrument de politique économique, l’impôt sert aussi, et surtout dans le cas de Madagascar, la cohésion sociale.
L’impôt, à ce titre, doit servir de moyen privilégié et de catalyseur à une redistribution de revenus pour :
. éradiquer la pauvreté et les situations de précarité ;
. l’appui aux orientations définies ci-dessus concernant particulièrement l’économie dite « informelle », les petites structures , la jeunesse.
Quant à la maîtrise des marchés, il s’agit :
. à la base de redonner vie au système traditionnel des « tsena » (marchés locaux) par leur approvisionnement régulier grâce précisément à la reprise des activités de proximité visées plus haut ;
. d’autre part, pour ce qui concerne les activités et produits de rente, il s’agit ici également de leur assurer tant au niveau national qu’international des débouchés, par le développement et le renforcement du réseau existant, mais aussi en étant en capacité de conquérir de nouveaux marchés régionaux ;
. enfin, s’agissant des produits phares de Madagascar (vanille, café, girofles, cacao, etc…), des actions précises consistant, d’une part, à assurer la stabilité des prix, et d’autre part, à trouver le juste prix sur les marchés internationaux, sont à mener dans l’immédiat, ce en concertation avec les organisations professionnelles. De plus, à l’international et dans le cadre d’une politique volontariste de promotion de la « Qualité Madagascar », étant donné que nos produits sont intrinsèquement de grande qualité, il conviendra de travailler parallèlement à maîtriser les circuits de distribution et à conquérir des marchés dits « de niche » ;
. en outre, deux produits phares de Madagascar, demeurés en souffrance depuis de trop nombreuses années, le riz et la viande bovine, doivent absolument retrouver leurs débouchés à l’international. Cela dépend prioritairement de la réhabilitation et de l’assainissement des secteurs concernés moyennant des actions drastiques au niveau normatif.
Tels sont la vision, les orientations principales et les leviers principaux à mettre résolument en œuvre si l’on veut que Madagascar retrouve la voie du progrès.
Non seulement en y préparant dès maintenant l’ensemble des Malagasy, mais surtout en les concrétisant avec méthode, volonté et vigueur, ce dans un esprit de mobilisation nationale et de concertation permanente.
Qui sera, actuellement – et non pas demain – l’homme ou la femme à même de porter haut de telles exigences ?
Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo,
Expert international en Bonne gouvernance.
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