ALLONS GAIEMENT VERS LA GUERRE NUCLEAIRE !…

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« Eclats » (JPRA)


                               ALLONS GAIEMENT VERS UNE GUERRE NUCLEAIRE !

Fin avril 2018, par une surprenante et agréable décision le Guide Suprême de la Corée du Nord, Kim Jong-Un, annonçait vouloir mettre fin aux essais nucléaires auxquels il nous avait habitués pour entretenir cette terreur nucléaire qui, ailleurs au lendemain de la fin de la seconde guerre mondiale, forçait, par la vertu de la dissuasion nucléaire, les puissants de ce monde à la Paix l’arme au pied.

Mais ce n’était là que du bluff car en réalité ces essais ont très récemment repris. Et ceci semble faire écho aux menaces proférées par un Président Poutine qui, semblant être acculé dans ses retranchements, envisage sérieusement d’utiliser, dans sa guerre contre l’Ukraine, l’arme nucléaire.

Ainsi, la menace d’une guerre nucléaire, que le Président américain Biden redoute désormais, n’a jamais été aussi pressante sur la surface de la Terre.

DE MULTIPLES COCKTAILS EXPLOSIFS

Mais, les menaces nucléaires coréenne et russe ne doivent pas masquer l’existence permanente des foyers de tensions et de conflits ouverts et en voie d’extension touchant pratiquement tous les continents, et sont autant de cocktails explosifs favorables à la tentation d’usage d’armes nucléaires.

Pour ne citer que ces exemples :

. le Proche-Orient et le Moyen-Orient, avec la persistance des tensions et conflits impliquant des pays à potentiel nucléaire déclaré ou non, comme Israël et l’Iran, ou sur-armés comme l’Arabie Saoudite et l’Egypte, sont des poudrières d’une particulière dangerosité ;

. l’Europe est en alerte, l’arme au pied, la tension provoquée par l’invasion de l’Ukraine entraînant une concentration armée (y compris nucléaire) des pays membres de l’OTAN mais aussi ceux qui traditionnellement étaient neutres (Suède, Finlande, etc…), mettant ainsi la Russie et le monde occidental à nouveau face à face à la manière de la très grave crise de Cuba de 1962 ;

. en Asie orientale la tentation dominatrice de la Chine – hors même la question de Taïwan – provoque à propos des îles Paracel et Spratly une course à l’armement (notamment marin sous-marin et aéronaval). Et à nouveau les velléités de conquête chinoise sur Taïwan font frémir et entraîne la formation de multiples alliances militaires impliquant tous les pays du pourtour maritime, incluant des pays occidentaux tels que les France, l’Allemagne, le Canada ou le Royaume-Uni.

Or, tous ces pays ont, à des degrés d’équipement divers, des capacités nucléaires, non seulement stratégiques mais également du champ de bataille.

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« Hommages aux victimes » (JPRA)


De fait, d’une part l’atomisation et la fragmentation des conflits armés sont une réalité qui s’accentue et les rend de plus en plus incontrôlables, car provoqués et entretenus par des intérêts les plus divers et donc échappent à toute maîtrise ; d’autre part, tant la sophistication que la diversité des armes et de leur puissance les rendent de moins en moins contrôlables malgré la haute technicité de leur mise en œuvre.

Les facteurs de risque et les impondérables sont ainsi démultipliés.

RISQUES REELS DE DECLENCHEMENT …

A tout ce qui précède il faut ajouter – surtout –  que l’irresponsabilité et l’inconscience, mais aussi le cynisme de certains hauts dirigeants de ce monde constituent autant d’éléments aggravants. Et ici, la palme revient, de faon partagée, au Leader du régime nord-coréen Kim Jong-Un et au Président russe Poutine.

Au titre des « justifications » avancées, rappelons-nous que pour décider de larguer successivement deux bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki en août 1945, le Président Truman des Etats-Unis avait cumulativement avancé la « nécessité » pour la première puissance militaire mondiale d’éviter d’aggraver le nombre des pertes humaines sur les champs de bataille sur le sol japonais, et le risque que par le nord les Soviétiques parviennent à devancer les Américains dans la reddition des forces japonaises, et il trouva donc là le moyen le plus radical de mettre immédiatement fin à la guerre (cf. sur ce même blog notre article « 6 aôut 1945 : le 1er bombardement atomique décime le Japon » daté du 6/8/2015).

Le cynisme est ainsi attesté par la « facilité » avec laquelle le président américain n’avait pas hésité, connaissant le caractère massif et les dégâts colossaux et irréversibles que causerait une explosion atomique, à frapper à deux reprises dans un laps de temps très raccourci le peuple japonais lui-même, là où sans aucun doute une seule bombe atomique aurait certainement suffi à le mettre à genou.

Ce précédent « historique », qui sert incontestablement de marqueur, était le fait d’un président dont aujourd’hui encore tout le monde s’accorde à dire qu’il ne pêchait ni par irresponsabilité ni par inconscience…

Or, aux jours présents où la panoplie des armes nucléaires se décline en catégories multiples et en nombre exponentiel, allant de l’hyperpuissance thermonucléaire capable de détruire la Terre entière à la sophistication d’une bombinette destinée à être opérée comme un canon sur un champ de bataille dit « restreint », en passant par une multitude d’armes nucléaires dites « tactiques », le protocole de leur mise en œuvre respective obéit au principe de la décentralisation décisionnelle.

De sorte que, même si la chaîne de commandement assure théoriquement un degré élevé de maîtrise décisionnelle pour la mise à feu nucléaire, d’une part, le cynisme – en dehors-même de la folie – du donneur d’ordre n’est jamais à exclure dans un moment ultime pour emporter la décision, et d’autre part rien ne peut garantir avec certitude qu’un accident ou une erreur fatale ne sauraient jamais intervenir. Mais, on peut également craindre que des organisations terroristes et criminelles – les deux qualificatifs se conjuguent souvent…- s’emparent – est-ce déjà le cas ?… – des connaissances utiles à la fabrication ou à la maîtrise d’armes nucléaires.

Devant les circonstances du moment, rappelons-nous aussi qu’à son époque récente le Président Trump des Etats-Unis s’était servi d’une certaine onction populaire et démocratique discutable pour présenter au Congrès un énorme budget de près de 88 milliards de dollars destiné à la production dans les plus brefs délais d’une panoplie importante de « minibombes nucléaires ». Ces « merveilles », maniées comme un vulgaire pistolet entre les mains d’un Donald Trump adepte invétéré de l’art de dégainer à la manière des films de Cow-Boys, lui qui encourageait l’armement des professeurs d’écoles primaires pour y assurer la sécurité, vont pouvoir être mises en œuvre « localement » et de façon ciblée dès 2019 sur les champs de bataille, ce paraît-il sans risque de provoquer de débordements nucléaires… !

Une telle décision de banaliser et de « faciliter » l’utilisation de l’arme nucléaire n’est sans doute pas sans lien avec la décision du même Président Trump, de faire sortir les Etats-Unis de l’Accord international sur le nucléaire iranien, lui qui estime en dépit des constats contraires opérés par une équipe onusienne de contrôleurs que l’Iran chemine vers son armement nucléaire (voir post-scriptum du 9/5/2018 ci-dessous).

Le message était clair : devant les récentes « résistances » iraniennes en forme de menace à peine voilée en ce mois de mai 2018, lesquelles s’expriment avec fermeté par son Haut Dirigeant, les Etats-Unis se tenaient prêts à une confrontation armée, avec une possible utilisation de l’arme nucléaire, soit par bombinettes actuellement déjà disponibles, soit par minibombes plus sophistiquées qui devaient être opérationnelles en 2019.

On notera que de telles dispositions d’esprit guerrier sont toujours actuellement de mise d’un côté comme de l’autre…

On croit rêver, mais c’est malheureusement une probabilité… avec laquelle il faut désormais s’habituer à vivre ! Ce, d’autant plus que nul doute que d’autres puissances nucléaires vont, au titre de la dissuasion, se doter à leur tour de ces « merveilles » de la tuerie propre, ciblée et limitée…

L’ABSENCE DE GARDE-FOU

Certes, des progrès ont été – et sont – enregistrés en matière de contrôle du nucléaire, tant civil que militaire, la frontière entre les deux usages étant par ailleurs bien fragile.

Mais, nous sommes encore et toujours dans l’hypocrisie et le cynisme.

Car, pour des motifs de puissance, alimentés par la dimension et la donne stratégiques, aucune puissance de ce bas monde, grande, moyenne ou petite, ne veut se mettre à nu devant son adversaire du moment ou potentiel en abandonnant la maîtrise de son armement nucléaire, si rudimentaire qu’il soit. On connaît la formule, très récemment encore servie par la Corée du Nord : l’arme nucléaire est, en toute hypothèse, l’arme de dissuasion par excellence du pauvre contre le puissant…

Du côté du nucléaire civil, ce n’est guère mieux. On sait, au moins depuis la catastrophe de la centrale nucléaire de Tchernobyl, et plus récemment avec celle de Fukushima (voir sur ce même blog notre article intitulé « Fukushima mon amour – Retour sur une catastrophe nucléaire », daté du 19/3/2016), que les dévastations sur les plans de la santé publique, de l’environnement et de l’écosystème non seulement dépassent l’entendement mais s’étendent sur un temps non encore mesurable (voir aussi sur ce même blog notre article intitulé « Haro sur les catastrophes écologiques d’origine humaine », daté du 11/3/2014).

De la sorte, le bannissement de l’arme nucléaire est une illusion (voir notre article sur ce même blog intitulé « Le bannissement de l’arme nucléaire, une illusion ? », daté du 26/9/2017). Ceux qui la possède ou qui sont en passe de la posséder tiennent par-dessus tout à garder leur avantage supposéEt du côté du nucléaire civil, l’argument massue consistant à considérer que l’énergie nucléaire est écologiquement « propre » et est maîtrisée technologiquement est bien entendu mensonger.

Ainsi va le monde… ! Sans réel garde-fou…

                                                    Jean-Pierre Razafy-Andriamihaingo

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Reproduction, même partielle, interdite des textes et illustrations


POST-SCRIPTUM (9/5/2018)

On le sait, la décision annoncée le 8 mai 2018 par le Président Donald Trump de retirer les Etats-Unis de l’Accord nucléaire sur l’Iran, qui s’aggrave du rétablissement des sanctions américaines contre ce pays (alors qu’il eût été possible que lesdites sanctions ne fussent pas rétablies…), aura des conséquences désastreuses quant à la paix régionale mais aussi mondiale. Ce, sans parler du fait que les Etats-Unis se posent en gendarme économique dans la mesure où les entreprises qui font affaire avec l’Iran seront désormais sanctionnées par les lois américaines…

Car, même si les autres pays, en particulier européens, ont déclaré vouloir non seulement se maintenir dans l’Accord mais, surtout, rechercher les voies pour son amélioration, les réactions en chaîne, à commencer bien sûr de l’Iran lui-même, mais également de son alliée la Russie et, en arrière-garde, de la Chine, et pourquoi pas du Pakistan, ne vont pas tarder à se manifester avec plus ou moins de détermination et de violence, ce sans compter, dans le camp américain, que Israël et l’Arabie Saoudite ne vont pas rester les bras croisés pour chercher à affaiblir l’Iran.

Tout ceci constitue autant de facteurs supplémentaires de risques d’embrasement soulevés ci-dessus dans le corps de notre article.

Rappelons aussi, pour bien mesurer le caractère cynique et provocateur de la décision américaine, qu’en confirmation des constations réalisées par les inspecteurs onusiens sur sites en Iran même, le Directeur général de l’Agence Internationale de l’Energie Atomique, Monsieur Y. Amano, tenait à déclarer ce 9 mai 2018 que l’Iran respecte en tous points l’Accord nucléaire que le Président Trump venait de déchirer.

En fait, la donne stratégique fondamentale, qui est à la base de la décision du Président Trump,  est évidente : les Etats-Unis ne veulent pas d’un Iran régénéré, qu’il possède ou pas l’arme atomique. Et déjà, fort de ce signal donné par le président américain, dans un face-à-face guerrier Israël et l’Iran engagent, au lendemain même de la malheureuse décision du 8 mai 2018 du Président Trump, à la frontière avec la Syrie (des troupes iraniennes étant présentes dans l’ouest syrien face à Israël) des combats qui vont inévitablement provoquer de fortes ripostes massives israëliennes…

La démonstration est ainsi faite que les risques redoutés deviennent rapidement réels et sont d’autant plus menaçants qu’ils s’alimentent à la base de réactions épidermiques à l’encontre de ce qu’il faut bien considérer comme autant de provocations de la part du Président Trump.

Ce qui fait aussi que la dimension cynique dans la prise de décision du feu nucléaire, que nous relevons ci-dessus dans le corps de notre article, doit d’autant plus entrer en ligne de compte dans l’évaluation et la probabilité d’une guerre nucléaire qui commencerait sur le champ de bataille, mais avec des risques d’escalade. 

Mais, on espère se tromper…

 JPRA