« Bal des baleinaux », pastel sec – Jipiera – (Reproduction interdite )
LABODIPLO est heureux d’inaugurer la Nouvelle Année 2020 par la récurrente question écologique avec un jeune universitaire engagé en politique et dont, précisément, le devenir et l’avenir en dépendent.
Il s’agit de Ferréol Delmas, qui est par ailleurs chroniqueur dans le Journal « Marianne » et directeur du Laboratoire d’idées « Ecologie responsable ». Son article – qui suit – tombe à bon propos, non seulement parce qu’il est représentatif de ces jeunes pleinement conscients de l’acuité et de l’urgence de la question écologique, mais aussi parce que sa foi catholique l’engage davantage à appeler à un engagement pleinement responsable à « sauver la maison commune » ainsi que le préconise le pape François dans sa lettre encyclique « Laudato Si' » (pour sa part, Labodiplo y avait consacré un article intitulé « Sauver la maison commune » le 11/7/2015).
Ferréol Delmas, à vous la parole !
CHRETIEN ET ECOLOGISTE ?
Alors que le pape venait récemment de terminer son tour du Japon, prêchant une vision écologiste pour l’Eglise, il est intéressant de revenir sur le rapport entre christianisme et écologie. Ainsi, en 2015, le pape François publiait son encyclique Laudato si’ dont le sous -titre était « sur la sauvegarde de la maison commune ». Elle était consacrée aux questions environnementales et sociales, à l’écologie intégrale, et de façon générale à la sauvegarde de la Création, dénonçant la dégradation environnementale et le réchauffement climatique. Il est, en effet, intéressant, alors que le synode sur l’Amazonie vient de s’achever, de constater un véritable engouement des chrétiens pour ces questions tellement cruciales pour les décennies et siècles à venir.
UN APPEL A « UNE CONVERSION ECOLOGIQUE »
Si le synode, c’est à dire, en l’espèce, la réunion des évêques et dignitaires ecclésiastiques de l’Amazonie devait régler des questions régionales, la présence du pape et la prédominance du sujet écologique est la trace d’un véritable appel « à une conversion écologique » des chrétiens. En effet, les pères synodaux ont lancé un appel pressant à ce que l’Église, avec sa voix d’autorité dans les domaines moraux et spirituels, protège toujours la Création : « Oui à une conversion écologique centrée sur la responsabilité et sur une écologie intégrale qui place au centre avant tout la dignité humaine, trop souvent piétinée » peut-on ainsi lire dans Vatican News, l’organe de presse officiel du Saint-Siège.
Le pape appelle à un changement des mentalités sur l’écologie. Plus que des petites mesures isolées, ou des variations à la marge des budgets nationaux comme c’est le cas en France, il souhaite que l’environnement soit au cœur des vies, fondant son approche sur le message christique. Fidèle de Saint François d’Assise, il prône cette fameuse « écologie intégrale » qui permet « d’éliminer les causes structurelles des dysfonctionnements de l’économie mondiale et à corriger les modèles de croissance qui semblent incapables de garantir le respect de l’environnement ». Le pape place ainsi une limite au modèle actuel mettant en cause le gaspillage des ressources de la Création proposant de ne pas se contenter seulement de solutions techniques (qui ne s’attaqueraient qu’aux symptômes), mais souhaite un véritable changement de l’Homme.
Le choix de l’Amazonie, poumon vert du monde, est aussi le signe d’une prise en considération des héritages et des traditions. Quel endroit est-il mieux préservé par l’enlaidissement du monde ? Et si l’écologie prônée par le pape François n’était pas aussi un appel à l’enracinement ?
A L’ECOLE DE SAINT FRANCOIS D’ASSISE
Le saint patron de l’écologie, depuis le 29 novembre 1979 et la « bulle spéciale » du pape Jean-Paul II est considéré comme le premier des « écolos », sa pensée étant au XXIème siècle, une grande source de réflexion. Comme le rappelle Aleteia « ce petit homme insignifiant, qui n’a jamais mis les pieds dans une université » refusait de couper un arbre, si cela n’était pas absolument nécessaire.
Il plongeait les mains dans l’eau claire, qu’il buvait au creux de ses mains, louant le créateur de l’avoir faite « utile, précieuse et chaste ». Ce saint a une parole criante d’actualité mais aussi d’apaisement. Face aux oiseaux de mauvaise augure qui s’agitent autour du fin du monde, ses écrits sont d’une profonde sérénité. Les changements de paradigmes contraints ne sont jamais efficaces, préférons alors une écologie positive fondée sur les énergies individuelles.
QUELLE ECOLOGIE POUR AUJOURD’HUI ?
Écho au synode, la question écologique a été abordé à Lourdes début décembre 2019, par la Conférence des évêques de France, qui proposait de développer le label « Église verte » qui entend encourager, chez les acteurs chrétiens, une véritable conversion écologique et qui concrètement, propose des formations et une aide logistique. Au-delà du travail de l’Église, il est urgent de repenser notre vision de l’écologie, loin des poncifs des « spécialistes » qui ne proposent que des solutions en carton-pâte et de belles manifestations sans lendemain. Des propositions très concrètes doivent émerger (cf. mon dernier article expliquant les propositions « d’Écologie responsable » pour une alimentation saine et variée).
Les exemples en matière d’écologie enracinée sont nombreux : l’association « Eden Ecologie » cherche à développer des circuits courts localement afin de diminuer les dépenses énergétiques, à défendre les traditions de production et d’élevage qui respectent la vie animale et présente une véritable charte des actions concrètes à mettre en œuvre localement. Cette organisation forme aussi « des scouts de l’écologie concrète » grâce à une école de vacances chargée de transmettre un savoir-faire, l’écologie étant selon « Eden Ecologie » une pédagogie.
Ce travail passe, enfin, par un profond labeur intellectuel à l’instar de la revue Limite qui œuvre pour une écologie fondée sur la « sobriété, la relocalisation, la convivialité et la fraternité » voulant dépasser l’écologie des bonnes intentions.
« Le monde est plus qu’un problème à résoudre, il est un mystère joyeux que nous contemplons dans la joie et dans la louange » a dit le Pape François lors de ce synode. Plus qu’un déclin de la civilisation, l’écologie est un retour aux sources.
Un retour joyeux.
Ferréol Delmas